Trouble des conduites alimentaires

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Troubles du comportement alimentaire
Description de l'image AnorexiaPaint.jpg.

Traitement
Traitement Psychothérapie et psychomotricitéVoir et modifier les données sur Wikidata
Médicament
utilisés, mais aucun ayant fait preuve d'efficacité
Spécialité Psychiatrie et psychologie cliniqueVoir et modifier les données sur Wikidata
Classification et ressources externes
CISP-2 P86Voir et modifier les données sur Wikidata
CIM-10 F50
CIM-9 307.5
MeSH D001068

Wikipédia ne donne pas de conseils médicaux Mise en garde médicale

Les troubles des conduites alimentaires (parfois appelé troubles du comportement alimentaire) (TCA)[1] se caractérisent par un trouble en rapport à l'alimentation. Ils sont généralement répandus à travers les troubles d'anorexie mentale, de boulimie et d'hyperphagie[2], mais peuvent également se manifester sous la forme de troubles dits atypiques, tels que l'orthorexie ou encore le pica. Ils peuvent apparaître à tout âge, notamment chez les adolescents et les jeunes adultes. Ils peuvent être reliés, plus rarement, à des troubles psychiques plus sévères comme les dépressions, les psychoses (délire d'empoisonnement) ou traduire un fonctionnement borderline et/ou addictif.

Les TCA sont à distinguer d'affections organiques telle que l'anorexie, qui est une perte d'appétit lié un trouble somatique.

Les TCA peuvent être transitoires ou durables et alors parfois devenir invalidants, engendrant même un risque vital, en particulier pour l'anorexie mentale. Les traitements de ces troubles sont effectués en collaboration entre par exemple médecin traitant, psychiatre, pédiatre, diététicien, psychologue. Ils comprennent généralement des aspects psychothérapeutiques, éducatifs (comportementaux), diététiques et médicaux. Les traitements mobilisent souvent l'entourage, famille, conjoint, etc.

Epidémiologie[modifier | modifier le code]

Les TCA touchent généralement les femmes adolescentes ou jeunes adultes des pays occidentaux. En France, 600 000 personnes seraient touchées par des TCA[3]. Sa prévalence a augmenté avec la pandémie en 2020 chez les jeunes[4].

Anorexie mentale[modifier | modifier le code]

Dans environ 85 % des cas, elle commence entre 15 et 25 ans. Elle touche 0,6 % de la population adulte caucasienne, avec une nette prédominance de femmes. Sa mortalité annuelle est estimée à 1 %[2].

La moitié des personnes atteintes atteignent la rémission complète et 30 % la rémission partielle. Il existe parfois des rémissions spontanées, notamment dans les formes à début précoce[2].

Boulimie[modifier | modifier le code]

Elle touche davantage les 10-19 ans, en zone urbaine. Sa prévalence est estimée à 1,5 % chez les femmes et 0,5 % chez les hommes[2].

Hyperphagie boulimique[modifier | modifier le code]

Sa prévalence serait comprise entre 3 et 5 %, avec une prédominance féminine moins importante que pour les deux autres troubles. Selon certaines sources, environ 40 % des personnes souffrant d'obésité seraient atteintes de ce trouble[2].

Classification[modifier | modifier le code]

Les troubles des conduites alimentaires sont classifiés en tant que trouble d'Axe I[5] dans le manuel diagnostique et statistiques des troubles mentaux (DSM-V) publié par l'Association américaine de psychiatrie (AAP).

La classification retient aussi dans les TCA d'autres troubles, de l'ingestion des aliments : pica, mérycisme, restriction ou évitement de l'ingestion d'aliments et d'autres non spécifiques. Ils représenteraient environ 40 % des TCA[2].

Etiopathogénie[modifier | modifier le code]

Les TCA seraient causés par une interaction entre des facteurs biologiques (facteurs génétiques et neurobiologiques), psychologiques (personnalité, émotions, etc.) et sociaux (influences socioculturelle et familiale)[6],[7]. Plusieurs autres facteurs, comme l’historique familial (dépression, obésité, etc.) et les expériences personnelles (abus sexuels, diètes familiales, etc.) pourraient également influencer le développement de la problématique[6]. Ils se manifestent par exemple par une préoccupation tyrannique du poids, ou au contraire une négligence totale du corps. Ils comportent parfois une dimension suicidaire à laquelle le spécialiste consultant doit particulièrement veiller. Les enjeux psychiques de ces symptômes doivent être appréciés et évalués en fonction de la personne qui en souffre et de son histoire, celle de son environnement y compris l'environnement de la petite enfance et d'évènements déclencheurs de la symptomatologie. La seule présence - ou absence - d'un symptôme ou d'un autre ne suffit pas pour établir un diagnostic différentiel.

La mode de minceur, les mauvaises habitudes alimentaires, les phénomènes d'imitation entre adolescents, l'influence des médias - et autres facteurs socioculturels - jouent un rôle certain mais qu'il est difficile d'apprécier et qui de toute façon est assez peu pertinent dans les prises en charge. Origine sociale : anorexie plus fréquente dans les classes sociales moyennes et supérieures[8].

Comorbidités[modifier | modifier le code]

Elles sont essentiellement psychiatriques : épisodes dépressifs caractérisés, trouble bipolaire, troubles obsessionnels et compulsifs, phobie sociale, trouble anxieux généralisé, personnalité borderline, troubles addictifs[2].

Prévention[modifier | modifier le code]

Deux niveaux de prévention peuvent se distinguer :

  • la prévention primaire, qui consiste à prévenir un problème avant qu’il n’apparaisse, en développant des habitudes nutritionnelles plus équilibrées (réglementation en matière de publicité ou de restauration scolaire, par exemple) et en luttant contre l’apologie de l’extrême minceur (exemple : charte signée avec les professionnels du secteur de l’image) ;
  • la prévention secondaire qui consiste à freiner le développement d’une maladie, en intervenant le plus tôt possible auprès d’une population à risque. Cela se fait avec le patient et sa famille ainsi que le médecin référent et l’ensemble des éducateurs[9],[10],[11].

Il existe de nombreux outils de dépistage et de diagnostic des troubles des conduites alimentaires. Il y a un grand intérêt à dépister les formes subsyndromiques des troubles des conduites alimentaires, pour proposer une prise en charge adaptée avant l'aggravation et/ou la chronicisation des troubles. Par exemple, la thérapie centrée sur les émotions peut être une méthode de prise en charge des troubles des conduites alimentaires[12]. Les formes installées et/ou chroniques sont plus difficiles à prendre en charge sur le plan thérapeutique[13].

Conséquences[modifier | modifier le code]

Différentes conséquences physiques, psychologiques et comportementales sont associées aux TCA. Plus spécifiquement, il est possible d’observer des perturbations au niveau de l’humeur, de la participation sociale, du sommeil, des pensées obsessionnelles, des capacités intellectuelles, de l’activité cardiaque et hormonale, de la santé buccale, de la coloration de la peau, de la perte de cheveux, et plusieurs autres[7].

Symptômes et complications[modifier | modifier le code]

Les symptômes et les complications varient selon la nature et la gravité du trouble de l'alimentation. Certains symptômes physiques de troubles de l'alimentation sont la faiblesse, la fatigue, la sensibilité au froid, barbe réduite chez les hommes, la réduction des érections, baisse de la libido, perte de poids et insuffisance de la croissance. Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est le plus fréquent désordre endocrinien susceptible d'affecter les femmes. Bien que souvent associé à l'obésité celui-ci peut survenir chez les personnes de poids normal. SOPK a été associé avec crises de boulimie et les comportements boulimiques[réf. nécessaire].

Traitement[modifier | modifier le code]

De nombreuses approches se sont avérées efficaces auprès des personnes atteintes de TCA. Entre autres, la thérapie cognitivo-comportementale qui peut aussi bien être utilisée avec les personnes atteintes d’anorexie mentale, de boulimie ou de troubles de l’alimentation non-spécifiés[14]. Plusieurs autres modalités thérapeutiques, comme l’utilisation de la thérapie familiale de groupe[15], la pharmacothérapie, la thérapie nutritionnelle, l’approche psychodynamique, la psychoéducation, la thérapie behaviorale et la thérapie cognitive sont également indiquées[6],[16],[17],[18].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Association américaine de psychiatrie (trad. de l'anglais), DSM-IV-TR: manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, Paris, Masson, (ISBN 2-294-00663-1)
  2. a b c d e f et g Collège national des universitaires en psychiatrie, Association pour l’enseignement de la sémiologie psychiatrique, Collège universitaire national des enseignants en addictologie, Référentiel de psychiatrie et addictologie, 2ème édition (ISBN 978-2-86906-419-5)
  3. Pascale Santi, Anorexie, une loi contre la maigreur, dans Le Monde du 3 juin 2015, suppl. science et médecine, p. 4
  4. « Anorexie, boulimie, aphagie… chez les jeunes, ces troubles du comportement alimentaire explosent avec la pandémie », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  5. (en) D Westen et J. Harnden-Fischer, Personality profiles in eating disorders: rethinking the distinction between axis I and axis II, vol. 158, , 547–62 p. (PMID 11282688, DOI 10.1176/appi.ajp.158.4.547)
  6. a b et c (en) Fairburn CG, Harrison PJ. « Eating disorders » The Lancet 2003;361(9355):407-16.
  7. a et b Institut Universitaire en Santé Mentale Douglas, Troubles de l'alimentation : causes et symptômes, Montréal 2011 [cited 2012 04-04].
  8. Henri Chabrol, L'anorexie et la boulimie de l'adolescente, Paris, Que sais je?, , p. 82
  9. « Habitudes alimentaires », sur infosantejeunes.usj.edu.lb
  10. « Présentation du plan « Santé des jeunes » », sur sante-jeunesse-sports.gouv.fr, (consulté le )
  11. Sarah-Jeanne Salvy, « TROUBLES DES CONDUITES ALIMENTAIRES : COMMENT PRÉVENIR SANS NUIRE », sur aqps.qc.ca
  12. Dolhanty, J., & Greenberg, L. S. (2007). Emotion-focused therapy in the treatment of eating disorders. European Psychotherapy, 7(1), 97-116.
  13. Samir Chelali, Les outils d'évaluation des troubles du comportement alimentaire:Les échelles et questionnaires d'évaluation des troubles du comportement alimentaire, Presses Académiques Francophones (20 juillet 2012)
  14. (en) Fairburn C, Cooper Z, Shafran R. « Cognitive behaviour therapy for eating disorders: a "transdiagnostic" theory and treatment » Behaviour research and therapy 2003;41(5):509-28.
  15. (en) Tantillo M. « A relational approach to eating disorders multifamily therapy group: Moving from difference and disconnection to mutual connection » Families, Systems, & Health 2006;24(1):82-102.
  16. (en) Grilo CM, Mitchel JE, editors. The treatment of eating disorders: a clinical handbook, New York: The Guilford Press; 2010.
  17. Institut Universitaire en Santé Mentale Douglas, Troubles de l'alimentation : traitements, Montréal 2011 [cited 2012 04-04].
  18. Piazza C, Carroll-Hernandez T. Évaluation et traitement des troubles de l’alimentation pédiatriques. Encyclopédie sur le développement des jeunes enfants, Montréal, Québec: Centre d’excellence pour le développement des jeunes enfants, 2004. p. 1-8.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Il existe une catégorie consacrée à ce sujet : Trouble des conduites alimentaires.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Fairburn CG, Welch SL, Hay PJ. « The classification of recurrent overeating: The “binge eating disorder” proposal » International Journal of Eating Disorders 1993;13(2):155-9.
  • (en) American Psychiatric Association, editor. Diagnostic and statistical manual of mental disorders. 4e ed. Washington DC: Author; 2000.
  • (en) Bryant-Waugh R, Lask B. Annotation: Eating Disorders in Children. Journal of Child Psychology and Psychiatry. 1995;36(2):191-202.
  • (en) Bryant-Waugh R, Kaminski Z. Eating disorders in children: An overview. Childhood onset anorexia nervosa and related eating disorders: Hillsdale, NJ, England: Lawrence Erlbaum Associates, Inc; 1993. p. 17-29.
  • Goëb JL, Azcona B, Troussier F, Malka J, Giniès JL, Duverger P. « Évitement alimentaire et trouble affectif chez l'enfant » Archives de Pédiatrie 2005;12(9):1419-23.
  • (en) Higgs JF, Goodyer IM, Birch J. « Anorexia nervosa and food avoidance emotional disorder » Archives of Disease in Childhood 1989;64:346-51.
  • Gheorghiev C, Consoli A, Marty F, Cohen D. « Une clinique de l’opposition à l’adolescence : du symptôme à la nosographie » Neuropsychiatrie de l'Enfance et de l'Adolescence 2010;58(8):507-12.
  • (en) Lask B, Britten C, Kroll L, Magagna J, Tranter M. « Children with pervasive refusal » Archives of Disease in Childhood 1991 July 1, 1991;66(7):866-9.
  • (en) Nicholls D, Chater R, Lask B. Children into DSM don't go: A comparison of classification systems for eating disorders in childhood and early adolescence. International Journal of Eating Disorders. 2000;28(3):317-24.
  • (en) Hudson JI, Hiripi E, Jr HGP, Kessler RC. « The Prevalence and Correlates of Eating Disorders in the National Comorbidity Survey Replication » Biol Psychiatry 2007;61(3):348–58.*
  • Hilde Bruch, Les yeux et le ventre, éd. Payot-Rivages, 1994, (ISBN 2228888362)
  • Karin Bernfeld, Déjouer les troubles alimentaires, Flammarion/Librio, 2007
  • René Roussillon et coll., Manuel de psychologie et psychopathologie clinique générale, 2007, (ISBN 9782294049569)
  • David Le Breton, L'adieu au corps, éd. Métailié, Paris, 1999, (ISBN 2864243261)
  • Anne Calife, Meurs la faim, éd Gallimard 1999, éd Menthol 2009
  • Pauline Vandersanden, Les Petits Déchets, Les Éditions du Net, 2013

Liens externes[modifier | modifier le code]