Rosalind Franklin

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Rosalind Franklin
Rosalind Franklin avec un microscope en 1955.
Biographie
Naissance
Décès
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Royal Marsden Hospital (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Sépulture
Cimetière juif de Willesden (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom dans la langue maternelle
Rosalind FranklinVoir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Rosalind Elsie FranklinVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Formation
St Paul's Girls' School (-)
Newnham College (baccalauréat universitaire) (-)
Université de Cambridge (doctorat) (jusqu'en )
Norland Place School (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Activités
Père
Ellis Arthur Franklin (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Mère
Muriel Frances Waley
Autres informations
A travaillé pour
Distinction
Archives conservées par

Rosalind Franklin est une physicochimiste britannique, née le à Notting Hill et morte le à Chelsea. Pionnière de la biologie moléculaire, elle formule la première, dans un rapport non publié, la structure hélicoïdale de l'acide désoxyribonucléique (ADN), découverte spoliée par Watson et Crick qui accèdent à son travail. Elle joue également un rôle majeur dans la découverte du virus de la mosaïque du tabac.

Biographie[modifier | modifier le code]

Rosalind Elsie Franklin est née dans une famille juive britannique établie[2], fille d'Arthur Ellis Franklin[3], marchand londonien, et de Muriel Frances Waley. Rosalind est la deuxième enfant d'une fratrie de cinq enfants[4].

Elle fait ses études secondaires à la St Paul's Girls' School, puis s'inscrit au Newnham College où elle passe la deuxième partie des tripos de chimie en 1941[4]. Durant la Seconde Guerre mondiale, elle poursuit des recherches sur le charbon auprès de la British Coal Utilisation Research Association (BCURA) à partir de 1942, tout en exerçant les fonctions de garde ARP à Londres[4]. Elle obtient son doctorat en physique-chimie à Cambridge en 1945 en étudiant la porosité de structures de carbone. En 1947, elle obtient un poste de chercheuse au CNRS et poursuit ses recherches au Laboratoire central des services chimiques de l'État, où elle utilise les techniques de diffractométrie de rayons X[5],[2],[6] pour déterminer les structures amorphes du carbone[7].

King's College et l'ADN[modifier | modifier le code]

En 1950, John Randall lui propose de créer un laboratoire de diffraction des rayons X pour étudier la structure de l'ADN au King's College de Londres. Elle prend ses fonctions en janvier 1951[4] et travaille avec le physicien Maurice Wilkins. En contrôlant précisément l'humidité des échantillons, elle parvient à distinguer la forme B de la forme A de l'ADN, plus rare mais souvent présente dans les échantillons déshydratés les plus souvent observés[7]. L'évolution de la structure de l'ADN avec l'humidité lui permet de réfuter les premiers modèles d'ADN établis par Maurice Wilkins, par James Dewey Watson, qui travaille également sur la structure de l’ADN à l’université de Cambridge, et par Linus Pauling de manière indépendante, qui considéraient que les groupements phosphates devaient se trouver au cœur de la molécule[5],[7],[8].

Les clichés d'ADN obtenus par diffraction des rayons X de Rosalind Franklin et de son élève Raymond Gosling, notamment le cliché 51, ont été déterminants dans la découverte de la structure à double hélice de l'ADN par James Dewey Watson et Francis Crick en 1953, publiée dans Nature[5],[2]. Franklin, en mauvais termes avec Wilkins qui avait cru voir en elle une assistante, refusait depuis longtemps de lui communiquer le résultat de ses travaux. Toutefois, en , ayant décidé de quitter le King's College, elle autorise Gosling à montrer le cliché 51 à Wilkins. D'autre part, son supérieur avait demandé que les résultats de ses travaux restent au King's College. Wilkins en donne connaissance à l'insu de Franklin à Watson et Crick, qui ont eu aussi accès à un rapport d'évaluation du département[5],[7]. Lorsqu'elle apprend que Watson et Crick d'un côté, et Wilkins de l'autre, vont publier dans Nature des articles sur la structure de l'ADN, Rosalind Franklin exige que l'un de ses articles[9], faisant état de la structure soit hélicoïdale, soit en forme de tire-bouchon de l'ADN[10], soit publié dans le même numéro[9].

Le , Nature publie donc les trois articles. Celui de Watson et Crick se contente d'indiquer qu'ils ont été « stimulés par une connaissance de la nature générale des résultats expérimentaux et des idées non publiées [de Wilkins et Franklin] »[11], et ils affirment dans le corps de l'article n'avoir pas eu connaissance des résultats présentés dans les deux autres articles de Nature qui confirment la structure hélicoïdale qu'ils proposent. Toutefois, Watson admettra par la suite dans The Double Helix que la connaissance de ces données était indispensable pour trouver la solution[12] et que personne, à King's College, n'avait réalisé que ces données étaient en leur possession[13]. Les trois articles parus dans Nature sont complémentaires, mais c'est celui de Watson et Crick qui est le plus mis en avant.

Birkbeck College[modifier | modifier le code]

Du fait des mésententes avec ses collègues du King's College, elle quitte cette institution en , pour rejoindre le Birkbeck College dans le département de John Desmond Bernal. Elle y utilise la technique de la cristallographie sur les virus[5], et permet la découverte de la structure du virus de la mosaïque du tabac avec Aaron Klug. Elle entame de nombreuses collaborations avec des laboratoires aux États-Unis qui permettront d'entreprendre des travaux sur le virus de la poliomyélite[7].

Après sa mort[modifier | modifier le code]

Elle meurt prématurément en 1958 d'un cancer de l'ovaire, probablement lié à l’exposition aux radiations lors de ses recherches[2],[6], sans savoir que les résultats qui vaudront à Watson et Crick le prix Nobel s'appuient sur ses travaux, dérobés à son insu[14].

Prix Nobel[modifier | modifier le code]

En 1962, Rosalind Franklin étant morte et alors que le prix Nobel peut encore être décerné à titre posthume[15], Watson, Crick et Wilkins obtiennent le prix Nobel de médecine pour cette découverte. Si Wilkins remercie Rosalind Franklin, ni Watson ni Crick ne la citent ni ne reconnaissent son rôle[16],[17].

Dix ans après la mort de Rosalind Franklin, James Dewey Watson, dans son livre La Double Hélice (en), minimise le rôle de celle-ci et la décrit comme une personne acariâtre. La famille de Rosalind Franklin, ainsi que Francis Crick, Aaron Klug et Linus Pauling, s'élèvent contre la description du travail et de la personnalité que donne le livre[7]. Watson finit par reconnaître, lors d’une interview en 2003, « que Rosalind Franklin aurait également mérité le prix Nobel »[18].

Hommages et distinctions[modifier | modifier le code]

En 2008, elle reçoit le prix Louisa-Gross-Horwitz à titre posthume[19].

Un prix Rosalind-Franklin est créé en 2003 par la Royal Society.

L'astromobile martien de l'ESA, le rover ExoMars, baptisé Rosalind Franklin[20], doit initialement être lancé en 2022[21].

Son nom est donné à des promotions de diplômés :

À Paris, le square Rosalind-Franklin lui rend hommage.

À Bruxelles, les cliniques universitaires Saint-Luc ont donné son nom à la tour des laboratoires[23].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (en) « https://profiles.nlm.nih.gov/spotlight/kr » (consulté le )
  2. a b c et d « Rosalind Franklin, génie incompris réhabilitée par Google », Le Point, (consulté le ).
  3. « Ellis, Arthur », dans Benezit Dictionary of Artists, Oxford University Press, (DOI 10.1093/benz/9780199773787.article.b00058478).
  4. a b c et d (en) Aaron Klug, « Franklin, Rosalind Elsie (1920–1958) », dans Oxford Dictionary of National Biography, (DOI 10.1093/ref:odnb/37431).
  5. a b c d et e Marcelle Rey-Campagnolle, « Rosalind Franklin et la découverte de la structure de l'ADN », notice biographique, 3 p. [PDF], sur sfp.in2p3.fr, Société française de physique (consulté le ).
  6. a et b « Connaissez-vous Rosalind Franklin, héroïne du Doodle du jour ? », sur bfmtv.com, (consulté le ).
  7. a b c d e et f Maddox 2012.
  8. Rosalind Franklin, à 2 brins du Nobel, La Méthode scientifique, France Culture, 5 avril 2018.
  9. a et b (en) « Due credit », Nature, vol. 496, no 7445,‎ , éditorial (DOI 10.1038/496270a, lire en ligne).
  10. Victoria Hernandez, « Molecular Configuration in Sodium Thymonucleate (1953), by Rosalind Franklin and Raymond Gosling », sur asu.edu, .
  11. « We have also been stimulated by a knowledge of the general nature of the unpublished experimental results and ideas of Dr. M. H. F. Wilkins, Dr. R. E. Franklin and their co-workers at King’s College, London ».
  12. (en) James Watson et Francis Crick, « Molecular structure of nucleic acids : a structure for deoxyribose nucleic acid », Nature, vol. 171, no 4356,‎ , p. 737–738 (lire en ligne [PDF]) (version html annotée).
  13. Brenda Maddox, « The double helix and the 'wronged heroine' », Nature, no 421,‎ , p. 407–408 (DOI 10.1038/nature01399, lire en ligne).
  14. Axel Kahn, « L’hélice de la vie », médecine/sciences, vol. 19, no 4,‎ , p. 491–495 (ISSN 0767-0974 et 1958-5381, DOI 10.1051/medsci/2003194491, lire en ligne, consulté le ).
  15. (en) « The Nobel Peace Prize 1961 », sur Prix Nobel : « Dag Hammarskjöld was awarded the Nobel Peace Prize posthumously. From 1974, the Statutes of the Nobel Foundation stipulate that a Nobel Prize cannot be awarded posthumously. ».
  16. « L'effet Matilda ou le fait de zapper les découvertes des femmes scientifiques », L'Obs,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  17. « Rosalind Franklin, pionnière de l'ADN », France Culture,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  18. Lire en ligne, France Culture.
  19. (en) « 2008 Horwitz Prize Awarded To Arthur Horwich and Ulrich Hartl For Cellular Protein Folding », sur Medical News Today, (consulté le ).
  20. (en-GB) esa, « ESA’s Mars rover has a name – Rosalind Franklin », sur European Space Agency (consulté le ).
  21. Brice Louvet, « L’Europe s’envolera pour Mars en septembre pour y chercher la vie », sur SciencePost, (consulté le ).
  22. « Cérémonie de remise des diplômes de doctorat », sur Sorbonne Université (consulté le ).
  23. « Tour des Laboratoires Rosalind E. Franklin », sur Cliniques Universitaires Saint-Luc (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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