« Papillomavirus: une nouvelle offensive politico-industrielle dénuée de fondement scientifique »: entretien avec le docteur Michel de Lorgeril

Le 24/03/2023 par Laurent Mucchielli

« Papillomavirus: une nouvelle offensive politico-industrielle dénuée de fondement scientifique »: entretien avec le docteur Michel de Lorgeril

Interrogé sur le blog de Laurent Mucchielli, le docteur Michel de Lorgeril, ancien chercheur au CNRS, analyse la controverse actuelle sur la vaccination contre les papillomavirus (HPV). Il montre comment, dans la suite immédiate de l’affaire du Covid, le gouvernement renforce encore son alliance avec l’industrie pharmaceutique, transformant le marketing de cette dernière en politique publique. Du point de vue scientifique, il n’existe selon lui aucune démonstration de l’efficacité de ces vaccins pour réduire la fréquence des cancers du col de l’utérus chez les femmes. La meilleure des préventions reste le dépistage régulier (triennal) et la correction des facteurs de risque de ces cancers (pas de tabac, pas de contraception hormonale, usage de préservatif, habitudes alimentaires contribuant à un microbiote génital protecteur, etc.). Cette politique de dépistage préventif permet déjà une diminution forte et régulière de l’incidence de ces cancers depuis plusieurs décennies

1) Michel de Lorgeril bonjour, je ne vous demande pas de vous présenter pour nos lecteurs car nous avons déjà réalisé ensemble un entretien consacré à la vaccinologie. Vous êtes médecin, ancien chercheur au CNRS et expert en médecine des vaccins, auteur d’une série très importante de livres consacrés à différents vaccins, livres qui forment une collection intitulée « Vaccins & Société » aux éditions Chariot d’Or. Le numéro 8 de cette série est titré Les vaccins contre les cancers. Rôle des papillomavirus dans les cancers du col de l’utérus, de l’œsophage et ORL. A distance des « médecins de cour » (comme Alain Fischer et Brigitte Autran) promus par le pouvoir politique et par les principaux médias, c’est donc un véritable spécialiste de cette question que j’ai souhaité interviewer au moment où le président de la République et son gouvernement tentent de généraliser dès le collège ce qu’ils présentent comme une vaccination devant « éradiquer » le cancer du col de l’utérus dont serait responsable le papillomavirus (ou HPV pour Human Papillomavirus). Qu’en pensez-vous ?

Depuis quelques semaines, nous constatons curieusement une agitation très politicienne à propos de la vaccination des pré-adolescents contre les papillomavirus. La vaccination sera gratuite dans les collèges en classe de 5ème. Certains redoutaient une obligation vaccinale. Beaucoup s’inquiétaient : que vont-ils encore sortir du chapeau ? Comme si cette question très médicale n’était pas avant tout du ressort du monde de la santé et donc devant être discutée exclusivement sous les auspices de la médecine scientifique.

Certains dans le monde médical approuvent bruyamment cette initiative des gouvernants, d’autres s’en offusquent, et encore d’autres hésitent à se prononcer. Cela donne lieu à une étrange controverse. Si, comme dit précédemment, la question était discutée par des scientifiques vraiment experts en la matière et vraiment indépendants (des gouvernants, des autorités sanitaires et des industriels), y aurait-il controverse ? Si les dossiers médicaux et scientifiques concernant les papillomavirus et les vaccins correspondants – dossiers riches et instructifs – étaient normalement consultés et vérifiés (par des vrais experts vraiment indépendants) y aurait-il controverse ? La réponse est négative. L’étrangeté de la controverse est liée au fait que les principaux protagonistes (politiciens, médecins et chercheurs médiatisés, y compris le professeur Raoult d’ailleurs) sont en réalité incompétents sur ce sujet complexe et qu’aucune voix scientifique sérieuse ne se fait entendre à ce jour.

2) A l’image de tout ce qui s’est passé durant la crise du Covid, nous constatons que le pouvoir politique et les principaux médias (qui ont abdiqué toute indépendance sur ces questions de santé) prétendent agir au nom de la science, alors qu’il s’agit en réalité d’une idéologie vaccinale hermétique à toute forme de réelle discussion scientifique. Comme toute idéologie (j’ai même proposé de parler de « religion vaccinale »), celle-ci divise de façon puérile le monde en deux : les gentils (provax) et les méchants (antivax), et le tour est joué. C’est le degré zéro de la réflexion. Comment avons-nous pu tomber si bas ?

Disons-le : nous vivons une époque d’effondrement des sciences médicales. Faute de réelle expertise, les acteurs de la controverse – provax et antivax, pour utiliser ce langage enfantin – se perdent dans des débats stériles. Il suffirait de consulter les dossiers. Ils existent. Mais, évidemment, il faut savoir lire et analyser ce type de dossiers complexes. Ce n’est pas donné à tout le monde et, dans le genre exécrable, les médias rivalisent d’idiotie, répétant comme des perroquets les argumentaires présidentiel et ministériels qui ne sont eux-mêmes que l’écho de la publicité des industriels, ce qui inclue les publications prétendument scientifiques qu’ils financent. La cheffe d’orchestre de ce très beau concert est l’International Papillomavirus Society, une fondation à but (supposément) non lucratif mais dont les sources de financement sont globalement inconnues car dissimulées. Une autre institution très appréciée des médecins – et célébrée par l’inévitable Quotidien du Médecin – est plus transparente à propos de ses sponsors : c’est Eurogin. Et il n’y a pas d’illusion ou de faux-semblants dans le monde du business vaccinal. Il suffit de consulter la liste des Platinum sponsors de cette société, c’est-à-dire des gros contributeurs pour l’organisation des débats et le financement des invités.

Je laisse de côté pour aujourd’hui un autre business non moins lucratif – illustré ci-dessus par la présence de Roche parmi les Platinum sponsors – qui est celui du diagnostic de la présence d’un HPV lors d’un prélèvement, frottis ou biopsie. En a-t-on besoin si le but du dépistage est la prévention d’un cancer ? Que nous importe qu’il y ait un HPV présent dans la lésion identifiée par le gynécologue ?

Cette confusion entre le dépistage/prévention du cancer du col de l’utérus et la présence d’un HPV dans une lésion suspecte (à surveiller ou à traiter d’emblée) vient de la théorie qu’il faudrait « éradiquer » les HPV du microbiote génital des femmes et de leurs conjoints grâce à la vaccination. D’un point de vue pratique, en médecine de terrain, ce diagnostic HPV n’a aucun intérêt vis-à-vis de la présence de cellules suspectes dans le frottis. Pire, les décisions des médecins pourraient être influencées du fait de la présence d’un HPV alors que seules les données cytologiques sont importantes en cancérologie.

Dans mon livre sur les vaccins contre les cancers, je discute aussi le rôle de la vaccination contre le virus de l’hépatite B dans la prévention du cancer du foie. Cette question est un autre simulacre de science médicale mais on peut s’attendre à une relance prochaine de cette vaccination contre l’hépatite avec l’argument anticancer.

La prévention des cancers est un discours puissant pour imposer, obliger (ou fortement recommander) des vaccins anciens ou nouveaux. Si nous avions réellement des vaccins contre les cancers, ce serait intéressant pour la santé publique et pour chacun d’entre nous ; il n’est donc pas inutile d’examiner ces questions. Mais il faut procéder selon les principes des sciences médicales, point par point, étape après étape, et se méfier des arguments marketing.

3) Pouvez-vous commencer par nous expliquer ce que sont les HPV ?

Selon les experts virologues, plus de 200 types d’HPV et plus de 160 papillomavirus animaux ont été identifiés. Les gouvernants et les médecins ne s’intéressent qu’aux HPV, c’est-à-dire les papillomavirus qui habitent les humains. Cela ne veut pas dire que certains papillomavirus animaux ne pourraient pas s’humaniser et coloniser les humains après croisements et mutations variés, mais cette question – pourtant primordiale pour anticiper l’avenir des vaccins contre les HPV – sort du cadre de cette analyse.

Les HPV sont désignés par un nombre. On a pris l’habitude de les classer aussi en fonction de leur tropisme cellulaire. Par exemple, les HPV 1 à 5, 7 et 8, 10, 27, 57 sont exclusivement cutanés. Les HPV 6 et 11 donnent les verrues cutanées et génitales (condylomes) et ne sont pas oncogènes (ne transforment pas les cellules en cellules cancéreuses) en principe. Les HPV 16, 18, 31, 33, 35 et 45 sont de types muqueux et génitaux et considérés cancérigènes, surtout HPV-16 et HPV-18. Ces deux derniers sont parmi les HPV les plus fréquemment impliqués dans les cancers du col de l’utérus. Ce sont des exemples mais, évidemment, nous ne connaissons pas grand-chose sur les centaines de papillomavirus (humains et animaux) identifiés sans compter toux ceux que nous ne connaissons pas encore et tous les mutants susceptibles d’apparaître si nous, les médecins et biologistes, interférons avec les Lois de la Nature, par exemple avec des campagnes de vaccination massive.

Je note que les vaccins anti-HPV ont évolué depuis leur apparition : d’abord dirigés contre un HPV, puis deux HPV, on est passé ensuite à quatre puis à neuf. Nul doute que les industriels préparent des vaccins dirigés contre encore plus d’HPV. Si les industriels ont enrichi la palette de leurs vaccins, c’est évidemment pour les rendre plus efficaces ; ce qu’on peut traduire en conclusion simple : les premiers vaccins n’étaient pas très efficaces – ce qui n’a jamais été dit clairement – mais on continue de les utiliser pour certains d’entre eux, par exemple le Cervarix de GSK dirigé seulement contre les HPV 16 et 18 alors que MSD commercialise un vaccin dirigé contre 9 HPV. On notera que GSK a hésité à le retirer du marché (ci-dessous un extrait de mesVaccins.net sur le Cervarix de GSK).

GSK est sympa et fait de la publicité pour le Gardasil 9 de MSD. C’est étonnant mais s’explique aisément. GSK estime que, en réponse aux campagnes massives de vaccination anti-HPV initiées par des gouvernements (comme en France en ce beau mois de Mars 2023), MSD ne suffira pas et qu’une part du marché reviendra à GSK. D’autant plus que MSD, de plus en plus gourmand, espère que de nouveaux marchés vont s’ouvrir (ci-dessous un extrait de mesVaccins.net sur le Gardasil 9 de MSD) avec la prévention de tumeurs bénignes du larynx. C’est un point important ; bien que nul (à ma connaissance) ne fasse la publicité de cet effet espéré du Gardasil 9.

La papillomatose respiratoire récurrente (PRR) est une tumeur non cancéreuse (bénigne) et rare du système ORL (le larynx essentiellement). Les HPV 6 et 11 étant possiblement impliqués dans la PRR et le Gardasil 9 étant dirigé contre ces deux HPV (et aussi 7 autres HPV), MSD prétend (ci-dessus) mais sans le dire vraiment que son vaccin pourrait prévenir l’apparition de ces tumeurs bénignes. Aucune étude clinique sérieuse n’a validé cette hypothèse. Pourtant, comme on peut le lire sur un site proche de la HAS : « La HAS s’est positionnée récemment en faveur d’une vaccination universelle (filles et garçons) et celle-ci est maintenant recommandée. Le rôle de l’infection à HPV dans la genèse des PRR et l’effet potentiellement protecteur de la vaccination HPV sur cette pathologie sont encore trop peu connus des professionnels de santé ». Ce positionnement étrange de la HAS (et donc des gouvernants) à propos de la vaccination anti-HPV et de la prévention de la PRR en l’absence d’essai clinique pourrait sembler anecdotique. On lit que « l’effet potentiellement protecteur du vaccin serait encore trop peu connu des professionnels« . Évidemment, il n’y a rien !

Si j’en parle ici rapidement, c’est parce que c’est extraordinairement symptomatique de l’évolution des esprits et des politiques gouvernementales post-Covid. On recommande fortement une vaccination chez des jeunes personnes « en âge de procréer » sur une base scientifique fragile voire inexistante. Aucun universitaire (ou autre supposé expert) ne s’alarme pourtant de cet effondrement de la médecine scientifique dans notre pays. C’est en fait la reproduction accélérée de toute la démarche concernant la vaccination anti-HPV pour la prévention des cancers du col de l’utérus. Mais c’est aussi la reproduction de l’ensemble de la problématique vaccinale anti-Covid. En l’absence de donnée scientifique solide – qu’il aurait été aisé de produire au cours de l’année 2020, année de forte épidémie dans de nombreux pays – on vaccine à tout va et sans précaution vis-à-vis des effets indésirables ; jusqu’à exiger un « passe vaccinal » pour des aspects de la vie courante, professionnelle et sociale.

Avant de passer à la question suivante, je reviens sur le risque de mutation des HPV en réponse à une pression vaccinale. C’est un risque réel mais j’appelle à ne pas paniquer : les HPV sont des virus à ADN qui, par définition, mutent peu ; ce qui ne veut pas dire qu’ils ne mutent pas. Je n’entre pas dans les détails mais cela n’a rien à voir avec la haute fréquence des mutations chez les virus à ARN type coronavirus.

4) Comment se présente aujourd’hui selon vous cette problématique des papillomavirus ?

En simplifiant, ces papillomavirus – HPV pour les intimes : PV pour papillomavirus et H pour Human car ne sont ici concernés que les HPV qui se plaisent et se multiplient chez les humains – ont été accusés de favoriser certains cancers, notamment ceux du col de l’utérus. Des industriels proposent des vaccins contre certains HPV en prétendant qu’on pourrait ainsi « éradiquer » (c’est le vocabulaire utilisé) les HPV et ainsi les cancers du col de l’utérus. Des gouvernants crédules ont décidé de stimuler cette approche préventive des cancers. Ont-ils des arguments solides ?

Les gouvernants français ne sont pas les premiers à s’engager sur cette voie et ils citent beaucoup les australiens qui ont adopté depuis plusieurs années une politique très offensive contre les HPV et s’en félicitent bruyamment. Les gouvernants suédois sont aussi très fiers de leur politique vaccinale anti-HPV. Les uns et les autres, ont-ils raison ? Je répondrai à ces questions plus loin.

Pour donner un aperçu honnête et crédible de cette problématique des HPV, il faut répondre patiemment à de nombreuses questions. Je laisse de côté la biologie (y compris la définition) des cancers pour insister sur un premier point crucial : les cancers ne sont pas des maladies infectieuses et encore moins contagieuses. On ne transmet pas des cancers d’une personne à une autre. Le rôle potentiel des agents infectieux dans certains cancers est donc indirect et difficile à expliquer. Avec les HPV, la problématique des cancers est particulière. Les HPV sont partout autour de nous mais certains se transmettraient surtout au moment des rapports sexuels. Je simplifie : un porteur sain (mâle ou femelle) – aucun symptôme, par définition – transmettrait au partenaire un ou plusieurs HPV. Ces derniers s’installeraient sur les cellules du col de l’utérus (ou les cellules du pénis) – c’est la phase d’exposition – et chez certaines personnes prédisposées provoqueraient une transformation des cellules qui, après plusieurs étapes, pourraient (rarement) donner une tumeur cancéreuse. Il faut plusieurs décennies pour qu’une tumeur cancéreuse maligne apparaisse. Cela laisse du temps aux bons médecins pour repérer les cellules transformées et les éliminer, si le système immunitaire ne le fait pas lui-même. En effet, les cellules exposées aux HPV peuvent les avoir rejetés ou les avoir « adoptés », c’est-à-dire qu’ils sont présents dans les cellules mais ne provoquent pas de transformation cancéreuse. Je résume : chez certaines personnes prédisposées, les cellules transformées ne sont pas éliminées, peuvent se multiplier et (très rarement) donner une lésion sur le col de l’utérus. Notamment aux stades précoces, les biologistes distinguent des lésions cancéreuses et des lésions précancéreuses (avec des cellules en cours de transformation) mais pas encore cancéreuses. Ces lésions précancéreuses peuvent guérir spontanément. Aussi, généralement, le médecin n’intervient pas et se contente de les surveiller.

Je pense que tous les lecteurs ont compris que le concept déterminant dans cette affaire c’est la prédisposition à accueillir les HPV puis éventuellement à développer des lésions précancéreuses et encore éventuellement des tumeurs cancéreuses malignes susceptibles d’envahir le tissu et ensuite de disséminer. Pour donner une idée de ces éventualités successives et du tempo évolutif, je rappelle que, en règle générale, l’exposition aux HPV survient à l’adolescence et que ces tumeurs malignes sont identifiées en général à partir de la 4ème ou 5ème décennie. Une tumeur cancéreuse met donc environ 30 ans pour devenir visible aux médecins avec un appareillage relativement simple (colposcopie). Cela laisse du temps pour empêcher le développement de ces tumeurs, notamment par de simples et innocentes mesures préventives (que je donnerai plus loin) ; et sans effet indésirable, contrairement aux vaccins dont, en plus, l’efficacité n’est pas démontrée.

5) Que savons-nous de l’épidémiologie et de la clinique des cancers du col de l’utérus ?

Je fais vite : les cancers du col de l’utérus étaient un des plus fréquents cancers de la femme. Ci-dessous un graphique résumant l’évolution récente de ce cancer en France, en termes de diagnostic et de fatalité. Ce sont des données officielles que chacun peut retrouver, par exemple sur le site de Santé Publique France.

Avec cette diminution de la mortalité due à ce cancer, nous avons sous les yeux les résultats d’une belle politique préventive contre un cancer en l’absence de tout vaccin. Bravo au dépistage triennal (les fameux frottis de ces dames tous les trois ans) qui permet de repérer les lésions dangereuses et de les éliminer avant toute propagation cancéreuse. Les générations se succédant – y compris du côté des médecins – il serait impératif de rappeler régulièrement (par des campagnes d’information appropriées) que ce cancer peut être empêché par des méthodes simples que je qualifie de médecine de terrain. Au moment du frottis triennal, le médecin peut aussi procéder à d’autres impératives vérifications : palpation des seins, des aires ganglionnaires, des trajets artériels, de la thyroïde, etcétéra. Le médecin – mais pas un succédané – peut aussi faire quelques rappels concernant le tabac, la nutrition, l’exercice physique… Ah la belle médecine que voilà ! Une médecine qui, du fait de la désertification médicale et de la médiocrité de la formation des nouvelles générations, désormais disparait sous nos yeux. Selon certaines enquêtes, la proportion des femmes qui bénéficient du frottis triennal diminue régulièrement… Faute d’information, probablement, mais aussi parce qu’il y a de moins en moins de médecins gynécologues sur le terrain, phénomène dit de « désertification ».

Sans décrire ici en détail l’anatomie de la femme, je rappelle qu’on distingue deux types de cancers du col de l’utérus : les cancers épidermoïdes développés à partir des cellules de l’exocol (environ 70 % des cancers du col de l’utérus) et les adénocarcinomes (à partir des cellules de l’endocol). Il est admis que presque tous les cancers de l’exocol sont peuplés d’HPV mais seulement la moitié (15 % du total) des cancers de l’endocol sont associés à des HPV. Dit autrement, une proportion non négligeable des cancers du col de l’utérus ne sont pas habités par des HPV, ou le seraient (peut-être) par des HPV non identifiables par les techniques classiques. L’idée qu’on puisse « éradiquer » – comme disent les industriels et les politiciens – les cancers du col de l’utérus grâce à la vaccination anti-HPV (dirigée contre un nombre limité d’HPV) est donc une illusion pour le dire poliment. Si les HPV sont considérés comme une cause possible (mais pas certaine) de certains cancers du cancer du col de l’utérus, je ne trahirais pas un secret en répétant ce que tous les experts admettent : les HPV sont une condition nécessaire – je dirais plutôt utile – mais non suffisante pour induire certains cancers.

Dit autrement, il faut d’autres facteurs que la présence d’un HPV pour induire un cancer du col de l’utérus. Selon certains experts proches de l’industrie, en l’absence d’HPV, ces autres facteurs ne suffiraient pas à eux-seuls à provoquer un cancer du col de l’utérus. C’est inexact puisque dans 15% de ces cancers, on n’identifie pas la présence d’un HPV ; ce qui ne veut pas dire qu’il n’y en n’ait pas, certes, mais on pourrait ne pas les avoir identifiés. On peut dire que les HPV et ces autres facteurs ne sont, ni les uns ni les autres, une cause unique du cancer du col de l’utérus. Il faut donc plusieurs de ces facteurs ensemble pour provoquer ce cancer. Nous sommes ainsi dans le contexte habituel de la majorité des pathologies que nous pouvons prévenir : des facteurs de risque (qui ne sont pas des causes) ont été identifiés ; et la prévention passe par l’élimination ou la diminution de ces facteurs de risque.

Quels sont les facteurs de risque de cancer du col de l’utérus que nous pourrions modifier ? Ils sont nombreux :

1) Certains HPV sont associés au cancer du col de l’utérus, en particulier HPV-16 et HPV-18 ; mais aussi le 31, 33, 35, 45, 52, 58, 39, 51, 56, 59, etcétéra.

2) États d’immunodépression. Certains sont évidents : HIV-sida mal contrôlés, transplantés d’organe recevant un traitement immunosuppresseur, patients avec certains traitements (stéroïdes et autres) pour des pathologies variées, etcétéra.

3) D’autres infections génitales. Les vaginites, l’herpès génital et les candidoses vaginales favorisent la cancérisation.

4) Une flore vaginale inadéquate, pauvre en lactobacilles.

5) La contraception hormonale a été accusée de favoriser le cancer du col. On a décrit des syndromes endocriniens [APICH (ou auto-immune poly-endocrinopathie immunitaire)] qui seraient favorisés par la contraception hormonale.

6) La précocité des relations sexuelles et la multiplicité des partenaires représentent un risque de transmission de facteurs infectieux (HPV, herpès, chlamydia, candidose, etc.).

7) Considérant l’importance de la transmission sexuelle d’agents infectieux variés (HPV, herpès, candidose, etc.), l’utilisation de préservatifs est considérée comme un facteur protecteur majeur contre les cancers du col de l’utérus.

8) Le tabagisme multiplie par deux le risque de cancer du col de l’utérus, probablement via des altérations du système immunitaire et du microbiote vaginal.

La prévention des cancers du col de l’utérus, outre le dépistage triennal, passe donc par des mesures simples de correction du mode de vie : pas de tabac, traitement des infections génitales, préservatifs, pas de contraception hormonale, et entretien d’un microbiote génital riche en lactobacilles. Si l’énergie et les coûts de la propagande vaccinaliste étaient consacrés à une information intelligente des adolescents concernant les facteurs de risque cités au-dessus, nous n’aurions pas besoin des vaccins.

Cette affirmation suscite une nouvelle question : les vaccins actuellement proposés par les gouvernants et les autorités sanitaires sont-ils efficaces contre les cancers du col de l’utérus ? En répondant à cette question, nous répondons à une multitude d’autres et nous fermons le débat : s’ils ne sont pas efficaces, il est inutile d’en parler et de se disputer. En fait, pour un scientifique prudent, la question ne se pose pas exactement dans ces termes. Il faudrait surtout se demander si nous avons des données solides montrant qu’en vaccinant contre certains HPV, nous diminuons le risque de cancers du col de l’utérus, et peut-être d’autres cancers. Avant d’analyser les vaccins anti-HPV, examinons cette question d’une relation entre certains HPV et d’autres cancers, notamment non génitaux. C’est un point crucial et peu connu des médecins.

6) Les HPV sont-ils impliqués dans des cancers autres que ceux du col de l’utérus ?

Les experts ont accusé les HPV de participer à l’émergence d’autres cancers que ceux du col de l’utérus : ceux de la vulve chez les femmes et du pénis chez les hommes et ceux de l’anus dans les deux sexes. Ce n’est pas impossible mais l’épidémiologie de ces cancers est plus compliquée et, à mon avis, les données existantes sont faibles ; ce qui revient à renouveler la question : avons-nous des données solides montrant que les vaccins anti-HPV diminuent le risque de ces cancers ? A ce jour, la réponse est négative ; ce qui ne veut pas dire que les HPV soient totalement innocents. Dit simplement : nous ne savons pas.

Finalement un type de cancer, celui de l’œsophage, a récemment suscité des discussions dans la communauté scientifique. Les cancers de l’œsophage ont un mauvais pronostic ; il serait important de savoir les prévenir, y compris avec un vaccin si cette solution est réaliste. Il y a peu d’études sur HPV et cancers de l’œsophage, alors je simplifie. Comme pour le cancer du col de l’utérus, il y a deux types histologiques : le carcinome épidermoïde et l’adénocarcinome. Apparemment, le carcinome épidermoïde – celui qui classiquement survient chez les consommateurs très excessifs de tabac et d’alcool – n’est que rarement (environ 20 % des cas) associé à une infection par un HPV. L’adénocarcinome est volontiers associé au reflux gastro-œsophagien, et généralement précédé d’une transformation des cellules du bas-œsophage (syndrome de Barrett). Une étude récente rapporte que l’infection par HPV de ces tumeurs était associée à un meilleur pronostic (moins de récidive) et une meilleure espérance de vie par comparaison avec des patients dont la tumeur était HPV-négative. Cette relative protection des HPV contre la dangerosité d’un type de cancer (ici les adénocarcinomes de l’œsophage) n’est pas un fait unique. Dans une autre spécialité (ORL), des investigateurs ont fait la même observation. Selon ces auteurs, dans les cancers de l’oropharynx, l’infection HPV améliorerait le pronostic des patients avec carcinomes épidermoïdes. Ces observations ont été confirmées par une méta-analyse réunissant plusieurs études suggérant que ces données étaient solides et probablement pas des coïncidences.

En résumé, dans les cancers de l’œsophage et les cancers ORL, les HPV semblent plutôt protecteurs. Ce fait est troublant et devrait inciter à la prudence avec les vaccins anti-HPV administrés à des millions d’individus.

6) Quel est l’historique des vaccins anti-HPV ?

Les vaccins anti-HPV apparaissent dans la pratique médicale au milieu des années 2000. Ils font une entrée triomphale avec des essais cliniques multiples conduits dans diverses zones géographiques. Ces études sont étroitement supervisées par les industriels qui commercialisent ces vaccins, rendant difficile l’interprétation des résultats publiés. C’est d’abord le Gardasil de MSD Vaccins (avec les antigènes correspondant aux HPV-6, HPV-11, HPV-16 et HPV-18) ; puis le Cervarix de GSK Vaccines(avec seulement les antigènes HPV-16 et HPV-18).

Un autre aspect spectaculaire de ces vaccins concerne les nouvelles technologies qui ont permis leur mise au point. On a utilisé la technique des VLPs (ou virus-like particles) qui se forment spontanément quand on produit deux des principales protéines (L1 et L2) d’un HPV dans un système cellulaire adapté.

Ces deux vaccins requièrent par ailleurs des adjuvants pour être immunogènes. Il y a de l’aluminium dans le Gardasil et deux adjuvants dans Cervarix dont l’aluminium. Il y a d’autres substances toxiques, notamment du polysorbate 80 dont j’ai décrit la toxicité dans le Livre 2 de la Collection Vaccins & Société.

Après une arrivée spectaculaire, ces vaccins ont été contestés et la controverse n’a pas cessé depuis près de quinze ans. Non seulement leur réelle efficacité est remise en cause, mais surtout leur innocuité. Je recommande la lecture d’un article paru en septembre 2018 dans le British Medical Journal, un journal médical que nul ne saurait qualifier de « complotiste » ! Les auteurs (des universitaires renommés) racontent leur inlassable quête d’informations concernant les effets indésirables des vaccins anti-HPV. Ils insistent sur l’impossibilité d’avoir accès à toutes les données que détiennent les industriels. Cette difficulté à analyser les données brutes des essais cliniques n’est pas nouvelle et jalonne l’histoire moderne des produits de santé, notamment des médicaments. Les vaccins ne font pas exception.

Concernant les bénéfices supposés des vaccins anti-HPV, d’autres critiques peuvent être émises. D’une part, les essais ne sont pas conduits en double aveugle avec certitude ; car ce sont les employés du sponsor qui ont la haute main sur les données brutes de chaque femme vaccinée. D’autre part, et c’est le point critique de cette problématique, il est clairement admis que le principal objectif des essais cliniques testant ces vaccins – pourtant présentés comme anticancers – ne pouvait pas être de montrer un effet anticancer. Pourquoi ? Pour deux raisons principales. La première tient au temps requis par une tumeur cancéreuse pour se développer et être diagnostiquée par les médecins. Les vaccins anti-HPV s’adressent en général à des jeunes filles qui n’ont pas encore été exposées aux HPV, entre 9 à 14 ans la plupart du temps [je dirai plus loin pourquoi]. Or, chez ces jeunes filles, on estime qu’il faut au minimum 20 ans pour qu’un cancer du col apparaisse. Il est évidemment impossible sur une si longue période de conserver deux groupes semblables tels qu’obtenus par la randomisation) pour tous les autres facteurs susceptibles d’influencer la survenue d’un cancer. Par exemple, rien ne garantit que sur une période de 20 ans, les jeunes aient des activités sexuelles, des méthodes de contraception (ou de protection) et des relations au tabagisme – des facteurs de risque majeurs du cancer du col de l’utérus – similaires dans les deux groupes initialement tirés au sort. Le manque de similitude pour ces facteurs de risque introduirait des biais majeurs incontrôlables dans ces essais cliniques de longue durée aux coûts extraordinaires. La durée de 20 ans nécessaire pour tester l’objectif primaire « cancers du col de l’utérus » est donc un handicap insurmontable. Il est impossible de mener à son terme un essai clinique randomisé testant une hypothèse anticancer requérant 20 ans de suivi et les industriels n’ont même pas essayé. Dit autrement, aucun essai clinique n’a jamais démontré un effet anticancer des vaccins anti-HPV.

La deuxième raison est encore plus importante et tient à l’éthique médicale. Pendant toute la durée de l’essai testant un vaccin anti-HPV, les jeunes femmes sont surveillées. Si une lésion précancéreuse dangereuse apparaît, elle est traitée pour empêcher le passage vers le cancer invasif même si le risque est relatif et que la lésion peut régresser spontanément. En principe, dans ce type d’essai, il ne devrait pas y avoir de cancers (encore moins de cancers invasifs) dans les deux groupes randomisés du fait de la surveillance attentive dont bénéficient les participantes. Si les investigateurs laissaient passer un cancer sans avoir traité la lésion précancéreuse dangereuse, cela pourrait leur être reproché devant un tribunal. Je répète : il n’y a jamais – et il ne devrait jamais y avoir – de cancer dans ce type d’essai clinique.

La conclusion de tout ceci est évidente : il est impossible de tester l’effet des vaccins anti-HPV contre des cancers. Faute d’essai clinique randomisé en double aveugle – indispensable scientifiquement et éthiquement – nous ne pouvons pas démontrer l’effet anticancer des vaccins anti-HPV.Ceux qui affirment le contraire sont des naïfs ou des menteurs. Nous pouvons au mieux soupçonner une éventuelle protection. Est-ce suffisant pour lancer des campagnes nationales de vaccination ? Sérieusement, non.

7) Comment les industriels et les autorités sanitaires procèdent-ils pour essayer de convaincre les médecins (et les familles) de l’efficacité anticancéreuse de leurs vaccins ?

Dans les essais cliniques, ils ont remplacé l’item « cancer » par un paramètre de substitution : la « lésion précancéreuse ». C’est un point crucial. Une lésion précancéreuse du col de l’utérus – comme de l’œsophage – n’est pas un cancer et peut guérir spontanément sans aucun traitement. De même qu’une infection par un HPV peut persister ou disparaître spontanément, en l’absence de traitement.

Si les lésions précancéreuses peuvent guérir spontanément, plus elles sont évoluées (du stade CIN-1 au stade CIN-3) et plus la probabilité qu’elles disparaissent sans traitement faiblit. Pour ceux qui voudraient bien comprendre l’histologie des lésions précancéreuses (de CIN-I à CIN-3), je ne peux que recommander à nouveau la consultation de mon livre ; il y a des graphiques explicatifs. Il n’est donc pas absurde en théorie d’examiner l’effet des vaccins anti-HPV sur les lésions précancéreuses à un stade évolué (CIN-3). On peut espérer qu’en ayant un effet préventif sur les lésions précancéreuses (CIN-3), on puisse diminuer le risque de cancer invasif ; mais cela reste hypothétique. Pour susciter la confiance, il faudrait que les essais cliniques aient été conduits à la perfection, notamment par des investigateurs indépendants des sponsors ; ce qui n’est jamais arrivé à ce jour.

Reste la durée nécessaire du suivi des jeunes vaccinées pour faire émerger une différence significative entre les deux groupes en termes de lésions précancéreuses évoluées et dangereuses (CIN-3). Certes, les lésions précancéreuses nécessitent moins de temps que le cancer pour se manifester, mais il faut quand même plusieurs années. Si l’hypothèse testée attribue aux HPV une responsabilité prépondérante, il faut tenir compte du délai nécessaire pour que les jeunes filles soient infectées, c’est-à-dire quelques années supplémentaires. On revient ainsi à la première raison pour laquelle il est difficile de tester l’effet anticancer des vaccins anti-HPV : la longue durée nécessaire de surveillance (au moins 10-15 ans) et la difficulté de garantir que les deux groupes constitués par tirage au sort restent semblables. Bref, ce qui est impossible pour les cancers invasifs reste très difficile, voire impossible, pour tester les lésions précancéreuses évoluées (CIN-3).

8) Que savons-nous exactement sur le Gardasil ?

Gardasil est le nom commercial du vaccin quadrivalent – ce qui signifie qu’il contient les antigènes de 4 HPV – de MSD. Ce fut le premier vaccin anti-HPV mis sur le marché français en 2006. On met en place une surveillance renforcée pour consolider les données sur le risque de survenue de maladies auto-immunes ; ce qui signifie qu’on connaît ce risque au moment où le vaccin est autorisé. Tout s’est passé très vite puisque les résultats du premier essai clinique randomisé testant le Gardasil sont publiés dans le Lancet en 2005. Pourquoi une procédure accélérée ? Sans doute parce qu’une entreprise française – très liée aux politiciens, de toutes obédiences – est impliquée.

L’étude de 2005 déjà citée (de Villa et collaborateurs) est certainement la mieux documentée, quoique l’échantillon soit petit. Cette étude illustre la médiocrité générale du dossier Gardasil. Elle est conduite en double aveugle (selon les auteurs) et le vaccin quadrivalent est comparé à un vrai placebo. La taille de l’échantillon est faible (552 jeunes femmes âgées d’environ 20 ans). La durée du suivi est brève (seulement trois ans), et le critère de comparaison pour juger de l’efficacité du vaccin est une combinaison d’infection par l’un de quatre HPV du vaccin et de lésions génitales variées potentiellement provoquées par l’un des quatre virus (cervical intraepithelial neoplasia, cervical cancer, or external genital lesions caused by the HPV types in the vaccine), c’est-à-dire des vrais cancers, des CIN ou encore des condylomes sur la vulve ou dans le vagin. Sur un suivi aussi bref, il est illusoire d’espérer voir un effet du vaccin sur des cancers invasifs ou des lésions précancéreuses évoluées. Cet essai clinique n’a donc pas de prétention scientifique, c’est une étude typiquement commerciale visant à impressionner des observateurs naïfs. On note qu’à la suite des trois injections, les jeunes femmes sont suivies scrupuleusement sur le plan gynécologique pour identifier la présence d’anomalies histologiques infra-cliniques (frottis) et la persistance ou l’apparition d’infections par un des quatre HPV couverts par le vaccin. C’est un point important : dans cette étude, quand les auteurs analysent les infections par HPV dans les deux groupes, ils font la différence entre les quatre HPV dont les antigènes sont présents dans le vaccin et tous les autres HPV.

Les auteurs concluent triomphalement que le Gardasil a une efficacité de 90 %. C’est ridicule et nécessite quelques explications. En fait, les investigateurs n’ont retenu pour leurs comparaisons initiales Gardasil/placebo que les lésions génitales ou extra-génitales contaminées par l’un des quatre HPV du vaccin. Ils n’incluent pas dans cette 1ère analyse d’autres lésions contaminées par d’autres HPV. Il est possible que dans le même temps, la nature ayant horreur du vide, les quatre HPV aient été remplacés par d’autres HPV, y compris des HPV potentiellement cancérigènes. La suite de l’histoire a montré que c’était le cas, et l’industriel a dû développer un nouveau Gardasil contenant d’autres HPV : c’est le Gardasil 9, déjà sur le marché au printemps 2023. Mais on peut espérer bientôt un Gardasil 14 ou un Gardasil 16. Ce 90% d’efficacité n’a ainsi aucun sens en termes de prévention de cancers. Mais beaucoup ont été abusés. Examinons le principal tableau des résultats de cette étude avec (ou pas) toutes les lésions identifiées quelle que soit l’infection par HPV. Je ne reproduis qu’une partie du tableau pour en simplifier l’analyse.

On compare les nombres d’évènements (Events) survenus chez les vaccinés [colonne de gauche, Vaccine (n=276)] et le groupe recevant le placebo [colonne de droite, Placebo (n=275)]. Les lignes du haut sont de peu d’intérêt puisqu’on compare les infections par un des quatre HPV du vaccin en présence ou en l’absence de lésion. Les quatre dernières lignes (surlignées) importent puisqu’il s’agit des lésions réelles infectées par un des quatre HPV : disease associated with HPV 6, 11, 16 or 18

Finalement, ce sont surtout les deux dernières lignes qui sont importantes puisqu’elles dissocient la précédente avec « External genital lesion » (ou condylomes bénins) et les CIN (ou lésions précancéreuses) sans faire de distinction entre CIN-1, CIN-2 et CIN-3. J’ai surligné les nombres d’évènements : 3 CIN dans le groupe Placebo contre 0 chez les vaccinés ; et 3 condylomes (External genital lesion) dans le groupe Placebo contre 0 chez les vaccinés. N’importe quel statisticien ou scientifique ne peut que sourire face à une telle naïveté : 3 à 0, cela ne veut rien dire ! Et cela ne permet pas d’affirmer une réduction de 90 % du risque comme le font les auteurs. Comment peut-on publier de telles inepties dans un grand journal médical ?

Le rôle du sponsor dans cette étude est important. Outre qu’il a rémunéré le journal, il est omniprésent dans la conduite de l’étude et ne s’en cache pas. Ci-dessous le court paragraphe où le sponsor explique que ses employés ont littéralement tout fait dans cette étude, de l’élaboration du protocole jusqu’à la collecte des données sur le terrain (c’est une étude multicentrique), la constitution de la base de données et les analyses statistiques.

Si ça n’était tragique, ce serait drôle. C’est une illustration de l’effondrement des sciences médicales. Cet effondrement a été observé lors de la Covid-19. On aperçoit avec la problématique des vaccins anti-HPV que cet effondrement était annoncé, déjà en 2005. L’étude de Villa navigue entre naïveté (réelle ou feinte) et désinformation. Pour avoir une idée plus solide des vaccins anti-HPV, nous devons aller un peu plus loin car, les années passant, les industriels ont étoffé leur dossier. Il est impossible de tout examiner mais on peut sélectionner certaines études que le sponsor lui-même présente comme emblématiques. Parmi ces études, j’en ai retenu deux très souvent citées (comme étant des références) et signées par un groupe d’investigateurs dont l’acronyme est The FUTURE II Study Group (FUTURE signifie Females United to Unilaterally Reduce Endo/Ectocervical Disease). Ce ne sont pas des essais cliniques à proprement parler mais des compilations d’essais cliniques. C’est important car il n’est plus question de tirage au sort et de double aveugle, les analystes plongent dans les bases de données de chaque étude et en extraient (ou pas) ce qui les intéressent pour présenter des analyses avec le but – tous les investigateurs sont proches des industriels – de contribuer au succès commercial du vaccin. Cette approche entre en contradiction avec les principes élémentaires de la médecine scientifique puisque les analystes construisent une nouvelle base de données combinant quatre études déjà désaveuglées et ils le font de façon totalement ouverte. J’ai publié dans mon livre plusieurs re-analyses de ces compilations d’études en reproduisant plusieurs tableaux et courbes extraits des publications et donc des auteurs eux-mêmes.

Concernant la première étude publiée en 2007, ma conclusion est claire : il n’y a pas d’évidence que ce vaccin anti-HPV réduira la fréquence des cancers du col de l’utérus dans la population étudiée (jeunes femmes de 16 à 26 ans). Il est curieux que les éditeurs du journal médical qui publie cet article l’aient laissé passer. Cela indique une certaine (coupable) complaisance. Que les autorités sanitaires à leur tour aient fermé les yeux en dit long sur leurs propres experts : totale incompétence ou complicité ?

La deuxième étude (également publiée en 2007) est semblable à la précédente, sauf qu’elle se focalise sur les jeunes femmes de 15 à 26 ans qui n’étaient pas positives aux HPV-16 et HPV-18 au début de l’essai. C’est un point important. Les investigateurs et le sponsor estimaient que si les femmes avaient déjà été exposées à ces virus avant d’être vaccinées, il était peu probable que leur système immunitaire soit capable d’éliminer ces virus grâce au vaccin ; ce qui permettait d’expliquer l’échec relatif – quoique non avoué jusqu’alors – de l’étude précédente. Ils espéraient montrer qu’il fallait vacciner le plus tôt possible les jeunes filles, avant les premiers rapports sexuels qui sont la voie de contamination habituelle. Cette théorie est aujourd’hui validée puisque les experts et les gouvernants en France et ailleurs recommandent de vacciner en priorité les pré-adolescentes au collège. Je n’entre pas dans les détails mais je reproduis une seule courbe extraite de l’article montrant l’incidence de lésions (sans sélection en fonction de l’HPV identifié dans la lésion), la seule analyse recevable en termes de prévention de cancer.

On voit clairement un chevauchement des intervalles de confiance jusqu’au 36ème mois suggérant l’absence de différence significative entre les deux groupes (vacciné et non-vacciné).

Cet article confirme l’article précédent : le Gardasil ne peut pas empêcher l’apparition de lésions précancéreuses du col de l’utérus. Si on admet – ce qui est loin d’être évident à mon avis – que le Gardasil est actif contre les HPV-16 et HPV-18, et que les HPV sont nécessaires au développement de ces lésions précancéreuses – ce qui est encore hypothétique à mon avis – la seule interprétation possible de ces données est que d’autres HPV se sont substitués aux HPV-16 et HPV-18. C’est un phénomène de remplacement qui n’a rien de surprenant et que j’ai déjà décrit dans un autre livre à propos d’autres agents infectieux, notamment les pneumocoques. Ce phénomène de remplacement nécessite la mise au point de nouveaux vaccins avec de nouveaux antigènes correspondant aux nouveaux coupables. Comme il y a une multitude (des centaines connus plus des mutants encore inconnus) d’autres HPV ne demandant qu’à remplacer HPV-16 et HPV-18, il est à craindre que cette course poursuite ne se termine jamais. Ce que j’observe avec les vaccins anti-HPV de première génération a été intégré depuis longtemps par les industriels. Ils proposent désormais un Gardasil 9, un vaccin nonavalent (contenant les antigènes de neuf HPV) mis sur le marché le 10 juin 2015 et qui s’est substitué au Gardasil (qui ne sera plus commercialisé) dès l’année 2021.

9) Mais alors, au final, quel est l’intérêt du Gardasil 9 ?

L’industriel Merck – qui avait compris que le Gardasil ne pouvait longtemps faire illusion – a fait publier en 2015 dans le New England Journal of Medicine une étude susceptible de convaincre les médias et des autorités sanitaires complaisantes qu’en ajoutant de nouveaux HPV aux quatre présents dans le Gardasil conventionnel (analysé dans la section précédente) on aurait enfin un effet anticancer. L’étude est confiée à un groupe d’investigateurs dont l’acronyme est Broad Spectrum HPV Vaccine Study. Elle est présentée comme un essai randomisé en double aveugle conduit sur 14 215 jeunes femmes âgées de 16 à 26 ans. Elles reçoivent trois injections intramusculaires de Gardasil 9 ou du Gardasil conventionnel, qui sert de groupe contrôle ; ce qui signifie que le Gardasil 9 n’est pas comparé à un placebo, ce qui est problématique.

Pour simplifier, le Gardasil 9 contient cinq antigènes HPV de plus que le Gardasil conventionnel et l’étude veut montrer que les lésions précancéreuses infectées par ces cinq HPV (plus celles infectées par les quatre HPV du Gardasil) vont disparaître sous l’effet du Gardasil 9. Ce point présente un intérêt (commercial) pour l’industriel ; mais pour les patientes et leurs familles, le plus important est de faire disparaître toutes les lésions précancéreuses y compris celles générées par des HPV absents du vaccin et qui ont éventuellement remplacé ceux visés par les deux vaccins Gardasil. Plutôt que de montrer un tableau de chiffres, je reproduis les courbes d’incidence de ces lésions précancéreuses dans les deux groupes : 9vHPV représente le Gardasil 9, et qHPV le Gardasil conventionnel. On voit qu’il n’y a pas de différence entre les deux courbes.

En résumé, le Gardasil 9 ne protège pas plus que le Gardasil conventionnel – qui lui-même ne protège pas – contre les lésions précancéreuses.

10) Comment les gouvernements et les agences sanitaires peuvent-ils chercher à généraliser cette vaccination dans une situation scientifique et médicale aussi incertaine ?

La réponse est à deux niveaux. D’une part, on va faire comme si les études précédentes étaient positives ou n’existaient pas – c’est l’effondrement de la médecine scientifique que je décris depuis de nombreuses années et qui a trouvé une sorte d’apogée lors de la Covid-19 (nous en avons déjà parlé ensemble). Et, d’autre part, on va s’appuyer sur d’autres études dont la méthodologie est faible (étude rétrospective d’observation) pour affirmer que, depuis qu’on vaccine, l’incidence de divers cancers a diminué ; et cela grâce à la vaccination. C’est le degré zéro de la médecine scientifique mais qui s’en préoccupe ? C’est une dérive inadmissible en termes de santé publique mais qui s’en préoccupe ?

Un autre vaccin, le Cervarix de GSK avec seulement deux antigènes (j’en ai parlé au début de cet article), est proposé. Le dossier supposé scientifique est navrant. Je passe.

11) Les études d’observation ne sont pourtant pas sans intérêt. Que disent-elles ?

Un exemple de ce type d’étude de faible intérêt a été publié en octobre 2020. Les auteurs utilisent des registres couvrant une grande partie de la population suédoise. Ils ont croisé des données individuelles de jeunes femmes concernant les pathologies qu’elles ont pu avoir (notamment des cancers invasifs du col de l’utérus) et les données nationales de vaccination, incluant les vaccins anti-HPV. Presque aucun des principaux facteurs de risque de cancer du col de l’utérus (tabagisme, contraception hormonale, âge des premiers rapports sexuels, nombre de partenaires, type de protection, etc.) n’a été inclus dans les analyses. Faute de tenir compte de ces paramètres et en l’absence de tirage au sort, cette étude n’a strictement aucune valeur. C’est pourtant utilisé par des experts et les gouvernants pour recommander cette vaccination. L’autre exemple utilisé par les gouvernants est celui de l’Australie. Laissons parler des médias complices.

Si on laisse de côté les contradictions (on verrait les bénéfices de cette campagne anticancer mais pas sur le nombre de cancers…) et qu’on examine les courbes de cancer du col de l’utérus (Cervix) en Australie, on doit admettre que l’introduction de cette vaccination s’est traduite par une augmentation du nombre de cancers et pas l’inverse. Ce sont les données officielles fournies aux instances internationales et vérifiables (voir ici).

On pourrait certes discuter des heures sur l’interprétation de ce genre de courbe ; ce que je ne ferai pas. L’épidémiologie d’observation (rétrospective et sans tirage au sort) est une méthode faible qui apporte plus de confusion que d’information.

Ce type de données (contradictoires de la doxa officielle) n’est pas un privilège de l’Australie. D’autres pays vaccinateurs (la Norvège par exemple) montrent le même type de données paradoxales, c’est-à-dire une tendance à l’augmentation des cancers du col de l’utérus depuis qu’on vaccine. Une des explications possibles serait que le vaccin anti-HPV administré à une femme porteuse de lésions précancéreuses provoquerait une accélération de la cancérisation. Cette hypothèse, quoique non formulée officiellement, explique que certains experts demandent que la vaccination anti-HPV soit réservée exclusivement aux très jeunes femmes qui, en principe, n’ont pas encore de lésion précancéreuse ! C’est un point critique concernant la campagne de vaccination actuelle ! C’est aussi une terrible question de physiopathologie : l’administration d’un vaccin peut-elle aggraver la maladie visée par le vaccin, au moins chez certaines ? Y a-t-il d’autres exemples ? La réponse est positive. C’est le drame de la vaccination contre la dengue avec le Dengvaxia que je discute dans plusieurs livres, notamment Les vaccins à l’ère de la Covid-19.

Je résume : pour démontrer l’efficacité d’un produit de santé, il faut des essais randomisés en double aveugle. Faute de quoi, on risque de raconter des bêtises. Aucune politique sanitaire ne devrait être menée en l’absence d’essai clinique conduit par de vrais experts vraiment indépendants.

11) Pour finir, que sait-on des effets indésirables des vaccins anti-HPV ?

Sur la base des réponses aux questions précédentes, celle-ci est sans objet. On ne doit pas administrer un produit de santé qui n’a pas fait preuve d’un minimum d’utilité et donc d’efficacité biologique. Quels que soient les effets indésirables des vaccins anti-HPV – fréquents ou pas ; sévères ou pas – il n’y a aucune raison de prendre le moindre risque puisque, à ce jour, aucun bénéfice n’est espéré.

J’ajoute que le vrai problème concernant la validité des rapports sur les effets indésirables des vaccins (et des produits de santé en général) se trouve dans l’impossibilité d’avoir accès aux données cliniques brutes détenues par l’industriel et qui relèvent, selon les industriels, du secret industriel. Mais peu importe, sur divers sites – notamment mesVaccins.net – les industriels admettent de nombreux effets indésirables des vaccins anti-HPV. Que les experts, les gouvernants et les médias fassent comme s’ils n’existaient pas est sidérant.

De mon point de vue, les bénéfices de ces vaccins n’étant pas établis et la prévention des cancers du col de l’utérus (et d’autres cancers) dus aux HPV pouvant passer par des voies moins périlleuses (en particulier mais pas seulement par le dépistage triennal), je ne prendrais pas le risque de ces effets indésirables pour des jeunes patientes. La conclusion qui s’impose est simple : faute d’une démonstration sans équivoque de l’utilité médicale et sociale des vaccins anti-HPV, il est inconcevable et illégitime de recommander ce type de vaccination.

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