Tryptophane

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Tryptophane

L ou S(–)-tryptophane


D ou R(+)-tryptophane
Identification
Nom UICPA acide 2-amino-3-(1H-indol-3-yl)propanoïque
Synonymes

W, Trp

No CAS 54-12-6 (racémique)
73-22-3 (L) ou S(–)
153-94-6 (D) ou R(+)
No ECHA 100.000.723
No CE 200-795-6 (L)
Code ATC N06AX02
SMILES
InChI
Propriétés chimiques
Formule C11H12N2O2  [Isomères]
Masse molaire[1] 204,225 2 ± 0,010 6 g/mol
C 64,69 %, H 5,92 %, N 13,72 %, O 15,67 %,
Propriétés physiques
fusion 290,5 °C (décomposition)
Solubilité 13.1 g.L−1 dans l'eau à 25 °C[2]
Propriétés biochimiques
Codons UGG
pH isoélectrique 5,89[3]
Acide aminé essentiel oui
Occurrence chez les vertébrés1,3 %[4]

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

Le tryptophane (abréviations IUPAC-IUBMB : Trp et W) est un acide α-aminé dont l'énantiomère L est l'un des 22 acides aminés protéinogènes et l'un des 9 acides aminés essentiels pour l'humain. Il est encodé sur les ARN messagers par le codon UGG. C'est l'acide aminé protéinogène le plus rare composant uniquement 1,3 % des acides aminés totaux des vertébrés et 1,1% de ceux des protéines.

Propriétés[modifier | modifier le code]

Il est aromatique, apolaire et hydrophobe (comme la phénylalanine). Très fragile, il est détruit par les acides minéraux et ne peut être isolé dans les hydrolysats acides des protéines. C'est un acide aminé contenant un hétérocycle indole qui lui confère des propriétés spectroscopiques d'absorption dans l'UV à 280 nm et de fluorescence. En dehors de son utilisation dans la biosynthèse des protéines, c'est le précurseur d'autres composés importants comme la sérotonine, la mélatonine ou encore la bufoténine.

Biosynthèse et production[modifier | modifier le code]

Seuls les microorganismes et les plantes sont capables de synthétiser le tryptophane. Cette voie de biosynthèse utilise le chorismate ou l'anthranilate comme point de départ. Celui-ci est condensé sur du phosphoribosyl pyrophosphate (PRPP). Le cycle furanose de ce dernier est ensuite ouvert. Après décarboxylation réductive, il se forme de l'indole-3-glycérol-phosphate. Ce dernier est alors transformé en deux étapes : d'abord en indole, puis en tryptophane par la tryptophane synthase. Cette enzyme sert également dans le cadre de procédés industriels pour la biotransformation de l'indole en tryptophane.

Occurrence chez l'humain[modifier | modifier le code]

Dans l'organisme humain, le tryptophane est indispensable et représente environ 1 % des acides aminés présents dans les protéines (le plus rare des 20 acides aminés). Il est cependant requis pour la synthèse de la sérotonine et de la mélatonine, ainsi que pour la production d'une variété de métabolites appelés collectivement les kynurénines. Seulement ,le R-tryptophane possède une action de baisse de sensibilité aux récepteurs à la sérotonine 5-HT1A ,5-HT2B ,5-HT2C et 5-HT5A. Rendant les aliments contenant du tryptophane sous forme de mélange racémique nuisible aux récepteurs à la sérotonine

La production de la sérotonine dans le cerveau varie directement en fonction du transport du tryptophane dans le cerveau (au travers de la barrière hémato-encéphalique). Le taux de transport est lui-même inversement proportionnel aux concentrations des autres grands acides aminés neutres (leucine, isoleucine, valine, tyrosine, phénylalanine) qui lui font compétition à l'entrée du cerveau. Les concentrations de ces derniers, enfin, varient en fonction de la proportion en glucides et en protéines consommées. C'est ainsi que la consommation de sucre ou de repas sucrés aura pour effet d'augmenter indirectement les concentrations de tryptophane dans le cerveau, tandis qu'un aliment très protéiné (qui, paradoxalement, contient plus de tous les acides aminés, y compris le tryptophane), aura pour effet de diminuer les concentrations cérébrales de tryptophane et, probablement, de sérotonine[5].

Certains constituants alimentaires facilitent à notre organisme la synthèse de sérotonine, neuromédiateur qui régule notre humeur, notre comportement alimentaire et nous prépare au sommeil. Certaines situations physiologiques comme un régime hypocalorique par exemple, peuvent entraîner une baisse de sécrétion de la sérotonine, souvent responsable de stress, de fatigue psychique, de troubles du sommeil. Certains aliments sont riches en tryptophane : œufs, noix de coco, lactosérum ; d'autres en sont pauvres : maïs, carottes, chou.

Dans le cerveau, le tryptophane est hydroxylé par une enzyme, la tryptophane hydroxylase et transformé en 5-hydroxytryptophane. Ce 5-HTP est décarboxylé (en présence de vitamine B6) pour donner la sérotonine. Des suppléments de tryptophane et de son métabolite, le 5-hydroxytryptophane ou 5-HTP, favorisent la sécrétion de sérotonine. Plusieurs études ont établi leur intérêt dans le traitement de la dépression.

C'est le chercheur américain Richard Wurtman qui découvrit la forme L-tryptophane dans des travaux qui le conduisirent ensuite à des développements dans le domaine des fenfluramines[6].

Cas d'empoisonnement[modifier | modifier le code]

En 1989, la compagnie japonaise Showa Denko commercialisait aux États-Unis du tryptophane comme supplément alimentaire produit par manipulation génétique d'une bactérie. On assista alors à une épidémie d’une nouvelle et mystérieuse maladie, le syndrome éosinophilie–myalgie qui causait des douleurs musculaires[7]. Par la suite, on relia cette maladie à la consommation du tryptophane transgénique, imputable à une mauvaise filtration qui laissait passer un contaminant[8]. Ce tryptophane tua 37 personnes et en rendit 1500 autres infirmes. Il s'agit d'une véritable catastrophe industrielle liée à un produit obtenu par manipulation génétique commercialisé. L'utilisation de bactéries génétiquement modifiées pour produire de grandes quantités de tryptophane a mené à une production également importante d'impuretés[9].

Sources alimentaires de tryptophane[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  2. (en) David R. Lide, Handbook of chemistry and physics, , 89e éd., chap. 8 (« Aqueous Solubility and Henry’s Law Constants of Organic Compounds »), p. 115
  3. (en) Francis A. Carey, « Table of pKa and pI values », sur Département de chimie de l'université de Calgary, (consulté le )
  4. (en) M. Beals, L. Gross, S. Harrell, « Amino Acid Frequency », sur The Institute for Environmental Modeling (TIEM) à l'université du Tennessee (consulté le )
  5. (en) Wurtman RJ, Wurtman JJ, Regan MM, McDermott JM, Tsay RH, Breu JJ, « Effects of normal meals rich in carbohydrates or proteins on plasma tryptophan and tyrosine ratios », Am. J. Clin. Nutr., vol. 77, no 1,‎ , p. 128–32 (PMID 12499331, lire en ligne)
  6. « PULMONARY HYPERTENSION - Fen-Phen », sur antidepressantsfacts.com (consulté le ).
  7. L-tryptophan implicated in human eosinophilia-myalgia syndrome causes fasciitis and perimyositis in the Lewis rat., L J Crofford et al.; J Clin Invest., 1990, Vol. 86(5), p. 1757–1763. DOI 10.1172/JCI114902.
  8. An Investigation of the Cause of the Eosinophilia-Myalgia Syndrome Associated with Tryptophan Use, Belongia et al.; The New England Journal of Medicine, 1990, Vol. 323(6), p. 357-365)
  9. (en) EA Belongia, CW Hedberg, GJ Gleich, KE White, AN Mayeno, DA Loegering et al., « An investigation of the cause of the eosinophilia-myalgia syndrome associated with tryptophan use. », N Engl J Med, vol. 323, no 6,‎ , p. 357-65 (PMID 2370887, DOI 10.1056/NEJM199008093230601)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]