Ateliers Forcalquier

Une articulation


Danse forum
Comptes-ren­dus des ate­liers
For­cal­quier

!! Arti­cu­la­tion



Compte-ren­du de l’Atelier de danse-forum (danse explo­ra­tion) du 22 avril 2012, For­cal­quier

Aujourd’hui nous étions une bonne dizaine et ça a été très riche, une fois de plus. Notre thème qui a émer­gé était l’articulation.
Nous sommes parti.e.s ici d’une gorge ser­rée, là de four­mille­ments dans les mains et les pieds, des pieds froids, des avant-bras froids, d’une asy­mé­trie, d’une légè­re­té com­bi­née avec des lour­deurs à cer­tains endroits, la racine des che­veux qui se mani­feste et devient des racines d’arbre, dont jaillit une forêt. Puis aus­si un corps tout en sou­rire, heu­reux d’être là. Aus­si la dif­fé­rence (pour ne pas dire diver­gence) entre le haut et le bas du corps.

Sur le Köln-Concert de Keith Jar­ret nous sommes parti.e.s en explo­ra­tion, tan­tôt en se lais­sant por­ter par la musique, tan­tôt en l’ignorant ou la repous­sant, ou en y pico­rant de temps à autre. Pour ma part, cette sen­sa­tion de légè­re­té en contre-point de lour­deurs et/ou d’ancrages et points d’appui m’a emme­né au deve­nir étoile de mer ou poulpe, avec un centre bien tenu et ferme et des bras voguant dans tous les sens, se dépla­çant sur tout le fond de mer, avec des rayons de soleil trans­per­çant l’eau. Bien sûr, là, c’était l’imaginaire qui l’avait empor­té (comme pour l’arbre et la forêt) mais néan­moins, la connexion aux sen­sa­tions était main­te­nue. On a ter­mi­né cette explo­ra­tion avec plu­sieurs couples qui s’étaient trou­vés à être dans des mou­ve­ments ou pos­tures sem­blables ou paral­lèles, sans for­cé­ment s’en rendre compte. L’ouverture aux autres s’étaient pro­duite sans que j’en aie par­lé en amont. D’autant plus inté­res­sant !
En quelques minutes, le thème était trou­vé, entre haut-bas, légè­re­té-lour­deur, asy­mé­trie, chaud-froid : com­ment ça s’articule tout ça ? Et d’ailleurs, c’est quoi une arti­cu­la­tion ? (Saviez-vous que l’être humain en en a envi­ron 400 ? Rien que sur la tête, il y en a envi­ron 80, entre la cage tho­ra­cique, la colonne ver­té­brale et le bas­sin, il y en a envi­ron 190, sur les membres infé­rieurs et supé­rieurs, envi­ron 40 cha­cun.)
Il ne nous a pas fal­lu long­temps pour par­tir en impros, plus dif­fé­rentes les unes que les autres ! La pre­mière a débu­té avec une série de courts poèmes, qui, sans avoir été choi­sis spé­cia­le­ment, se répon­daient les uns aux autres. Les courts ins­tants de flute tra­ver­sière de G. ponc­tuaient les inter­mèdes ou, peut-être, arti­cu­lait chaque poème avec le sui­vant… ? Et la danse était par­tie, sur notre propre musique des corps, voix, poèmes et ins­tru­ments jusqu’au moment où quelqu’un a mis « In an automnes gar­den » de Take­mit­su, sans qu’on s’en aper­çoive – en tout cas pas moi. Fine­ment arti­cu­lé – encore une fois.

D’après les spect-acteurs.trices un grand fluide, une suc­ces­sion de pos­tures, ren­contres, mou­ve­ments ont été remar­qués, comme si ils avaient été pré­vus, vou­lus, et c’est par le fait qu’il ne l’ont pas été, vou­lus ou pré­vus, qu’ils ont pris autant plus de force. Etait-ce à cause du thème choi­si ? Ou pas ?

Au juste, donc, c’est quoi une arti­cu­la­tion ? Deux lignes – os- qui se rejoignent autour d’un espace, une inter­face, tenues par des liens, des fibres, des ten­dons, bai­gnés dans du liquide, ou pas, … là agré­men­tés par un ménisque, une rotule, là juste un liga­ment, un disque … se don­nant mutuel­le­ment la pos­si­bi­li­té de par­tir dans des sens divers, de se mettre ou de res­ter en mou­ve­ment … Ou alors deux corps qui s’imbriquent pour un ins­tant, che­minent ensemble, avec ou sans se tou­cher, et qui se séparent ensuite… Ou encore un point fixe, un mou­ve­ment constant, un ancrage qui donne un repaire et qui me per­met de vire­vol­ter autour… Ou des contraires qui s’attirent et se com­plètent… ou pas, car là peut se pro­duire la désar­ti­cu­la­tion aus­si, quand ça ne « colle » pas, ça va pas ensemble, ça s’entrechoque… Inté­res­sant aus­si ! Voir le der­nier ate­lier, sur le thème du « noeud », avec cette col­li­sion entre ma tête et la mâchoire de l’amie – pour­quoi c’est arri­vé ? J’avais lâché mon lien à mes sen­sa­tions et était par­tie dans le men­tal, de vou­loir faire un bond sur une note musi­cale pré­cise ! Et ça a fait « boum » ! Inévi­ta­ble­ment. Quand le men­tal se fau­file entre des corps liés aux sen­sa­tions, ça ne peut pas col­ler. Et ça peut faire très mal. Des mou­ve­ments, rythmes et actions peuvent être très dif­fé­rents et même contra­dic­toires, mais il faut redou­bler d’écoute, d’attention.

N. a remar­qué qu’une sorte de confiance, de tis­su (je ne me rap­pelle pas du mot exacte) d’écoute et d’attention s’était éten­du dans l’espace scé­nique (et dans l’espace tout court), qui per­met­tait d’y évo­luer sans peur, juste avec ce que mon corps me fait faire, en lien avec moi-même et avec les autres.

En tout cas, très ins­truc­tif tout ça, puis des beaux moments d’impros sonores, de lec­tures chu­cho­tées, à plu­sieurs voix, plu­sieurs textes simul­ta­né­ment, sur des registres dif­fé­rents – un grand moment !

Puis le corps en sou­rire a tenu bon du début à la fin, sans que cela serait deve­nu niais ou redon­dant, car en même temps tota­le­ment ancré. Rare cadeau !

Mer­ci à toutes et tous pour ce bel après-midi !

Pour le 23 mars, je trouve que danse forum et élec­tions muni­ci­pales (dans la salle au-des­sus de nos têtes et nos corps) ça ne s’articulent pas très bien, et je pro­po­se­rai donc, si le temps le per­met, de sor­tir dan­ser dans la nature ou s’il ne fait pas beau, de trou­ver une autre salle. Qui a une idée ou une pos­si­bi­li­té ? On ver­ra.

À bien­tôt en tout cas, ami­tiés, Johanna

Article créé le 16/02/2020

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