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!!Danse-musique et danse-théâtre – 18 novembre 2006
1 – Chacun, après une brève introspection personnelle, a défini par un
mot énoncé à voix haute, l’état d’esprit dans lequel il se trouvait à ce
moment (attachement, légèreté, flottement, poignardée, errance,
monolithique). Se laissant totalement envahir par cette sensation, chaque
danseur a laissé son corps aller pleinement dans la dynamique de celle-ci.
2 – A l’inverse, en choisissant de façon arbitraire une notion que nous
nous sommes efforcés d’intégrer par une mise en mouvement de nos corps en
adéquation à cette « notion-sensation » (torsion, liquide, balancement…),
nous avons tenté d’observer les changements d’états d’âme provoqués en nous
à la suite de cette pratique.
3 – Par groupes de deux ou trois, nous avons tenté de mêler, de faire
« dialoguer », ces différents états d’âme et de corps en mouvement animant
chaque danseur.
4 – Nous avons choisi d’aborder les deux thèmes suivants : le rapport
entre danse et musique et le rapport entre danse et théâtre. C’est en tentant d’aborder la
connivence entre danse et musicalité que l’un d’entre nous, à son insu
peut-être, a introduit la théâtralité dans sa danse. Deux groupes de deux
danseurs se sont successivement adjoints à lui pour donner naissance à deux
improvisations nous ayant démontré, chacune à leur manière, l’étroitesse des
liens qui existent entre danse, musique, et théâtre.
André
Nous étions huit. L’œil de la caméra vidéo était discret,
bienveillant, avec Annabelle qui fera de la danse forum son sujet
d’étude universitaire cette année. Elle nous en parlera plus
amplement.
Les sensations sont venues peu à peu, d’abord brutes de décoffrage,
puis en animant chaque cellule du corps.
Même chose en posant en amont le principe de mouvement qui nous convenait :
mouvement contradictoire, torsion, balancement, mouvement de l’eau,
les sensations s’en sont trouvées exhaltées dans leur expression.
Deux principes de mouvements se sont rencontrés avec trois niveaux
d’attention : écoute à l’autre, écoute de
ses besoins propres, appuis pour rebondir. Tout cela en silence.
Le forum évolue
- Le rôle du joker a commencé à circuler : l’exercice a révélé ses
difficultés et aussi ses potentiels : il faut avoir l’œil sur tout,
favoriser l’expression sans l’induire ni la diriger, pour qu’elle
reste la plus spontanée possible
- le choix des musiques est maintenant acquis par chaque participant
qui le souhaite, ça roule
- la caméra aussi circule de mains en mains, au gré des séances
- nous avons parlé de la rédaction des rapports d’ateliers. Les relais
vont se mettre en place, j’en suis sûre !
- la question s’est posée de définir ce que fait le « chorégraphe
improvisé » pour le forum : il fait de la mise-en-scène chorégraphique,
benjamine de la mise-en-scène théâtrale.
Ce samedi 18 novembre, nous n’arrivions pas vraiment à nous
départager entre le thème du rapport de la danse à la musique, et
celui de la danse au théâtre. Ce n’est qu’au bilan que nous nous
sommes rendus compte que les deux se sont mariés parfaitement, à
notre insu !
Nous avons commencé par voir quel rapport chacun pouvait entretenir
avec le jeu (enregistré) du gamelan javanais (après une mise en route en rapport
intime avec nous-mêmes) : neutre, difficile, conflictuel, fusionnel,
distancié.
Le problème a été posé dans ses termes : comment se relier à la
musique pour que LA danse éclose ?
L’un de nous s’y est essayé en laissant chaque partie de son corps
bouger sur un rythme spécifique de cette musique du gamelan, qui
avait été choisie justement pour sa polyrythmie. Etrangement, c’est
lorsqu’il s’est arrêté de bouger pendant quelques secondes, pour
prendre un rytme décallé où seul un doigt bougeait, que la
fragmentation a fait place à l’étincelle créatrice. Sinon, le projet
de mouvement était si audible qu’il faisait se taire la surprise.
Il a donc réessayé, en ne bougeant pas. Son corps était « contre » la
musique, son imagination « avec » la musique : le voyageur voit au loin
des soldats qui partent à la guerre ou en reviennent. Un danseur
est venu imprimer un mouvement, l’immobilité revenait aussitôt après.
Une danseuse s’est placée en contrepoint dans l’espace et le temps,
fusionnant avec la musique, comme une touche à un tableau déjà bien
accompli. Une autre a essayé de faire bouger l’immobilité.
L’immobilité a appliqué le premier principe de l’aïkido : utiliser la
force de l’adversaire plutôt que la contrer. L’adversaire est renvoyé
à lui-même comme le reflet du miroir à celui qui s’y mire.
Le bilan…
Il a fait résurgir la subtile différence entre intention et projet de
mouvement. Les deux utilisent la volonté et l’imaginaire, l’un plus
avec l’affectif, d’où son poids me semble-t-il, alors que l’autre
prend l’inconnu pour partenaire du connu, d’où sa relative légèreté.
Les deux posent le problème que l’on entend penser le danseur (ou
l’acteur) en amont du mouvement ou même de l’immobilité. L’ennui est
juste derrière la surprise…
Les différentes théâtralités sont aussi apparues dans la danse :
- lorsque la danse s’efface au profit de l’imaginaire,
- lorsqu’elle fait de l’espace un partenaire d’expression,
- ou encore si elle remplace le mouvement (neutre) par le geste
(expressionniste).
Ces théâtralités peuvent avoir leur place dans la danse, si on ne les
subit pas en les ignorant.
Le geste « théâtral » (ce coup-ci au moins bon sens du terme) a le don
de supprimer le relief de la danse. Elle devient un langage linéaire
et appauvri : l’intention est projetée et explicitée, ce qui dit deux
fois la même chose, en une redondance qui s’ignore.
Andréine Bel
d’après les retours de : Annabelle V, Andréine B, André, Johanna B, Ken M, Leonardo C, Marilyne M, Raphaël G.
Article créé le 16/02/2020