Danse forum
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!! Flots de vie – 30 avril 2008
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Nous étions deux, avec une certaine envie de ne pas faire grand-chose…
On s’est quand même motivées pour y aller, juste pour pas longtemps,
disions-nous.
Nous ne nous sommes rien dit de ce que nous voulions faire par avance (à
part : pas grand-chose). Si tôt entrée dans l’espace, sans même nous
concerter, nous sommes chacune allée dans notre coin pour nous relier à :
ici maintenant comment on est et ce qui nous traverse.
Et de là… nous sommes peu à peu entrées dans une improvisation
danse-théâtre-voix-marionnettes du tonnerre ! Qui est allé du pur
figuratif (danser avec un balais, faire se parler nos pieds…) au pur
abstrait (des lignes, des gestes), en passant par de longues pauses et
des moments d’explosion…
Nous n’avons eu à aucun moment la sensation de faire « n’importe quoi »,
restant reliées à nos sensations et besoins, y répondant même.
Et grâce à cela, je pense, l’imaginaire pouvait s’en donner à coeur
joie, se déployer sans que nous ayons à craindre qu’il nous embarque
trop loin de nous. Au contraire, relié aux besoins, l’imaginaire est
vraiment délicieux à explorer !
Nous n’étions pas comme en danse forum sur un espace scénique, mais le
lino sur le sol définissait de fait un espace duquel nous ne sommes pas
sortis, et dans lequel tout se passait. Nous étions à la fois
concentrées comme si nous étions sur un espace scénique, et à la fois
nous prenions les libertés que nous permettait le fait de ne pas y être :
se regarder et rire, faire des commentaires, quitter la concentration
et bouger normalement… J’ai beaucoup aimé cet espace, que je ne saurais
qualifier ; il ressemble un peu aux espaces de jeu des enfants, qui se
permettent aussi, au sein même de leurs jeux, des commentaires et des
réajustements en sortant de leurs personnages et histoires, et dont les
délimitations, comme pour nous le lino, seraient la parole « je ne joue
plus ».
Nadine Gardères
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Réaction d’Andréine, le 25 mai 2008
Plusieurs points importants que j’ai relevé dans ce texte de Nadine, avec quelques commentaires…
Le « n’importe quoi » apparaît ici en regard avec sa seule propre exigence intérieure, comme une sensation intime : je suis, ou je ne suis pas, dans le n’importe quoi. Ce repaire de sensation intime me semble fondamental.
Ainsi abordé, le n’importe quoi n’est pas ce jugement castrateur tant redouté avec raison, mais l’étayage qui permet la contruction de sa vie, son art.
Le figuratif versus l’abstrait : ces notions sont comme des poupées gigognes de même taille et donc assez facilement interchangeable, et on peut jouer avec elles à l’infini. Je pense par exemple aux onomatopées rythmiques qui semblent raconter des histoires ou des dialogues, ou au mime qui, à force de réalisme, touche à l’abstraction sublime.
« L’imaginaire relié aux sensations » – c’est toute la différence avec les sensations reliées à l’imaginaire – je le vois comme l’arbre relié à ses racines ; l’un nourrit l’autre : les racines sans l’arbre, cela ne donne pas grand-chose, et l’arbre sans racine, encore moins.
Quant à sortir de l’espace scénique tout en y restant, c’est un plaisir inavouable, de l’ordre du trompe l’œil pour cabinet secret, où l’on s’échapperait pour retrouver le goût du quotidien, ce qui est un nouveau trompe l’œil qui se cache dans le premier.
C’est du bon sang, tout cela, ça coule à flots de vie !
Article créé le 16/02/2020 – modifié le 10/06/2020