Ateliers Lambesc

La marionnette


Danse forum
Comptes-ren­dus des ate­liers
Lam­besc

!!La marion­nette – 16 décembre 2006

Nous étions cinq, dont quatre mous­que­taires.

La sen­sa­tion prin­ci­pale, celle qui émerge et qui va nous mou­voir est par­fois dif­ficle à défi­nir. C’est un peu comme aller à la pêche. Dans la mer, beau­coup de pois­sons, mais un seul va mordre à un ins­tant don­né. Une fois pêché, le pois­son, par sa chair va nous faire entrer dans un monde de par­fums, de saveurs, va nous nour­rir et nous consti­tuer. Une fois nom­mée, la sen­sa­tion nous fait entrer dans un uni­vers, que nous allons décou­vrir en même temps qu’elle nous sculpte.

C’est la sen­sa­tion de « pas­si­vi­té » qui a mis le feu aux poudres. La pas­si­vi­té dans le mou­ve­ment, c’est la marion­nette au bout des fils qui la main­tiennent. Mais cette marion­nette, pour bou­ger, est arti­cu­lée par un marion­net­tiste, qui lui-même se fond à sa marion­nette s’il veut qu’elle vive. La part de volon­té dans la mani­pu­la­tion est en dis­cus­sion avec la part d’involontaire dans le mani­pu­lé, et vice ver­sa : la part de volon­té du mani­pu­lé négo­cie avec l’involontaire du mani­pu­la­teur.

Nous avons essayé cela avec nous-mêmes puisque se mani­pu­ler soi-même est la chose la plus par­ta­gée au monde. La pas­si­vi­té a pris des cou­leurs, la volon­té s’est relâxée acti­ve­ment, les deux y ont gagné.

Puis à deux, avec un marion­net­tiste qui « agit » sa marion­nette active et vivante qu’est l’être humain. Il peut agir à par­tir des os et des arti­cu­la­tions, de la chair ou du souffle. Une caresse sur la joue, des mots mur­mu­rés, feront autant d’effet que la prise directe et auto­ri­taire. Le carisme, la séduc­tion, grands mani­pu­la­teurs de charme, sont en com­pé­ti­tion avec la prise directe, qui cherche à immo­bil­ser. Lequel est le plus cas­tra­teur ? Lequel peut insuf­fler la vie ? Quel rôle joue le mani­pu­lé ?

Nous avons ain­si glis­sé en dou­ceur et natu­rel­le­ment de la mise en route à la danse forum, le thème est venu comme un fruit mûr se détache.

Dès que nous pre­nons le temps de nous pen­cher sur la pro­blé­ma­ti­sa­tion du thème, la mise en scène cho­ré­gra­phique a plus de chance d’être mini­male et effi­cace, ce qui revient sou­vent à la même chose. Pour­tant, que de bal­bu­tie­ments dans la pro­blé­ma­ti­sa­tion, il y a tel­le­ment à décou­vrir encore ! Ne pas par­tir d’une expé­rience pré­cise et bien car­rée, mais d’un ensemble de res­sen­tis a eu l’inconvénient, ou l’avantage, je ne sau­rais le dire, de mettre d’emblée la com­plexi­té au centre du débat. Pour com­pen­ser, nous avons essayé d’aller vers les extrêmes, mais la pudeur nous en a pro­ba­ble­ment détour­nés. Pas de regret, le bon­heur de cette séance a ser­vi d’extrême !

Pas de vision­nage de la vidéo, repor­té à same­di 6 jan­vier 2007.

Mais deux lec­tures, faites par Raphaël Gime­nez et Ken Michel, de textes magi­fiques de la col­lec­tion Cri Urgent, aux édi­tions du Grand Souffle : « Couvre-feu, de Kamel, 15 ans, racaille », et « Libé­ré sur parole, Lucien, 58 ans, ancien déte­nu » ?

J’ai enten­du le souffle des mots, cares­sé leur forme, bu leur puis­sance. Le cadre s’est éva­noui, parce qu’il était là, accueillant et cha­leu­reux. Le faciès s’est effa­cé pour faire voir les paroles ins­crites puisqu’elles n’ont pu se faire entendre. Comme le gré­go­rien se délas­sant en liber­té dans l’espace d’une église accous­tique, les voix rebon­dis­saient des tré­fonds aux bouts des cils, les corps se levaient et rele­vaient tou­jours, et nous, sus­pen­dus à tant d’inassouvi !

Com­ment ne pas nour­rir la terre de nos larmes ?

Andréine Bel

d’après les retours de : Alexandre D, Andréine B, Leo­nar­do C, Mou­rad A, Raphël G.

Article créé le 16/02/2020

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